Qui se souvient de Miss Moretti ?
Par Abderrahmane Zakad – Les coupables ont changé, Meursault n'a rien pris et s'il a tué, c'est à cause du soleil. Eux, ils nous ont tout pris : le soleil, la grande bleue et la forêt, et on n'a pas de couteaux, car nous sommes non violents mais… patients.
On nous a volé Sidi Ferruch, la forêt
On nous a volé la plage, à notre âge
On nous a volé nos souvenirs, nos amours, nos désirs
Par Abderrahmane Zakad – Les coupables ont changé, Meursault n'a rien pris et s'il a tué, c'est à cause du soleil. Eux, ils nous ont tout pris : le soleil, la grande bleue et la forêt, et on n'a pas de couteaux, car nous sommes non violents mais… patients.
On nous a volé Sidi Ferruch, la forêt
On nous a volé la plage, à notre âge
On nous a volé nos souvenirs, nos amours, nos désirs
On nous a volé la sardine grillée, les merguez succulentes, les siestes lentes
Nos mains lançaient le cochonnet, les chardonnerets pépiaient
Nos mères faisaient du tricot, l'œil de biais
Nos femmes surveillaient les enfants
Les adolescents draguaient les cousines, premiers amours
Le père de la fille veillait au grain
Le père du garçon, inquiétude, chagrin
Nous nous respections, nous nous aimions
Les amitiés se tissaient, les trousseaux se préparaient
C'était d'antan, naguère, peut-être pas
C'étaient les années Boumediene
Le fier dinar avait du port oue zough
Le sachet de lait un dinar vingt, le poulet huit dinars, El-Moudjahid, l'unique, quinze centimes
Aujourd'hui, 1 000 journaux : source APS, kif kif le géniteur
On mangeait à la Grenouille : repas trente dinars et du beurre
On était heureux, on était beaux, et ils nous ont tout pris : la forêt, le cochonnet, la sardine, la merguez, la mer et même notre pipi : Aâllach hadh el-hogra, aâllèche, tout cela pour qu'une centaine de zigotos… puissent mourir tranquille au Club des Pins
Et nous encerclés, baillés, embastillés en ville sans rien
Levez-vous, les jeunes, edioua ioua ioua, edioua ioua ioua
Reprenez votre bien : Sidi Ferruch, le soleil, la mer, le cochonnet et le chardonneret.
Impromptu
Lehnina,
Ah! Ya eddenia. Oh! la vie
Khelitni m'hayar. Tu m'as laissé souffrant
Lebnette kanou nya. Les filles étaient candides
Ouana mazalni tayar. Et moi je suis encore en chasse
Galou ham jaou erfaga. Ils ont dits que la tribu est venue
Aîni bkat dmouê ekthir. Mes yeux ont pleuré, trop de larmes
Erjâat meskine ou herraga. Je suis devenu faible et harraga
Ouine enrouh bêche en'sib elkhir. Où dois-je aller pour le bien
Ebki,ebki, yalmeskine. Pleure, pauvre amoureux
Ouine trouh, trigue touila. Là où tu veux aller, la route est longue
Qalbek yabki, daouèk bel âïne. Ton cœur pleure, on t'a ensorcelé
Fi Moretti etssibe lehnina. A Moretti, tu trouveras ta chérie.
«Nos vos aimions les filles, nous vous aimons tojor» : l'inspecteur Tahar.
A. Z., le plus beau bébé d'Algérie en 1938
Ndlr : Les idées et opinions exprimées dans cet espace n’engagent que leurs auteurs et n’expriment pas forcément la ligne éditoriale d’Algeriepatriotique.