Les armes et la ceinture
Par M. Aït Amara – Que faut-il retenir – finalement – de cette affaire d’humiliation d’un ministre de la République dans un aéroport français ? Est-ce le fait d’avoir été fouillé ou celui de s’être laissé faire, portant ainsi atteinte à l’honneur de toute une nation ? Alors que l’Algérie était en proie à un terrorisme abject, financièrement exsangue, mise en quarantaine, montrée du doigt, deux hommes ont montré au monde ce que valent les vrais Algériens et démontré qu’il ne suffit pas d’avoir les caisses pleines à ras bord pour prétendre au statut de peuple fier. Au début des années 1990, un haut responsable se rendit en France dans le cadre d’une mission officielle. Quand l’avion du Groupe des liaisons aériennes ministérielles, relevant de la présidence de la République, qui le transportait, se posa sur le tarmac de l’aéroport du Bourget, à Paris, des officiers des services de sécurité français sont montés à bord pour «exiger» que les armes de la garde rapprochée du responsable en question fussent maintenues à bord. Ce dernier s’y opposa formellement en menaçant d’annuler la mission et de rentrer au pays sans même descendre de l’avion si les responsables français persistaient dans leur attitude. Paris acquiesça, alors, immédiatement en présentant ses plus plates excuses à l’officiel algérien en colère. Si cet épisode n’est pas connu du grand public, celui de la «réunion qui n’a pas eu lieu» entre Liamine Zeroual et son homologue français, Jacques Chirac, est resté gravé dans les annales des relations internationales. Qui ne se souvient pas, en effet, de cette réaction de l’ancien chef de l’Etat qui refusa de rencontrer l’ancien président français en tête-à-tête au siège des Nations unies, à New York, en octobre 1995 ? Nous étions à la veille de l’élection présidentielle et la France officielle, qui hébergeait les extrémistes du FIS, comptait bien s’immiscer dans ce rendez-vous charnière de la vie politique nationale. Nous sommes si loin de cette époque où les Algériens, assimilés à des «terroristes potentiels» dans une Algérie dévastée par une vague de violence inouïe et fragilisée par une situation économique catastrophique, marchaient la tête haute, malgré les turpitudes et les trahisons. Nous sommes si loin de cette époque où les Algériens souffraient dignement et résistaient noblement tout en sachant qu’à la tête du pays, des hommes veillaient à ce que leur orgueil fût préservé. Nos responsables d’hier refusaient de remettre les armes ; ceux d’aujourd’hui acceptent de retirer la ceinture.
M. A.-A.
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