Lancement du câble de fibre optique entre Alger et Valence : grave atteinte à la loi sur la concurrence
Le lancement par le ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication, du temps de Zohra Derdouri, d’un avis d’appel d’offres national et international restreint ayant pour objet «la mise en œuvre d’un système de câble à fibre optique sous-marin entre Oran et Valence (Espagne)», destiné aux soumissionnaires spécialisés dans le domaine des systèmes sous-marins, révèle plusieurs anomalies dont la plus frappante est la substitution de la tutelle à l’entreprise économique Algérie Télécom (AT) dans cette opération. C’est en fait une grave atteinte à la loi sur la concurrence que le ministère commet en prenant l’initiative de réactiver cet appel d’offres. Comment se fait-il, en effet, que ce soit le ministère qui lance l'avis d'appel d'offres pour le compte d'Algérie Télécom au lieu de laisser l’initiative aux opérateurs du secteur d'investir dans ce créneau pour aider le pays à rattraper enfin son retard dans le domaine des technologies de l’information et de la communication (TIC). Des pratiques que la tutelle réitère alors qu’elles sont clairement en contradiction avec les lois et règlements régissant le secteur et aux expériences menées dans d’autres pays à travers le monde ayant permis l’émergence de secteurs de TIC performants, y compris chez nos voisins les plus proches. Cette façon de faire de la part du ministère la Poste et des Technologies de l’information et de la Communication contredit de plus les propos du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui a insisté sur la détermination de son gouvernement pour assurer «une meilleure maîtrise de la dépense publique pour permettre aux opérateurs publics et privés d’effectuer leurs investissements». Le Premier ministre s’exprimait lors de la rencontre organisée il y a quelques semaines par le Conseil national économique et social (Cnes) autour des enjeux de l'économie algérienne face à la situation actuelle du marché pétrolier international. Parmi les recommandations figurait en bonne place la détermination de créer les conditions d’une concurrence saine qui mette, enfin, pour ce qui est des TIC, le secteur sur les rails. «La conjoncture actuelle est, certes, difficile mais elle offre aussi une excellente opportunité d'introspection et de prise de décisions audacieuses pour construire une nouvelle vision économique et modifier nos modes de fonctionnement et de régulation», en pariant sur la croissance, avait déclaré le Premier ministre. Il est à rappeler que les travaux de réalisation de câbles en fibre optique sous-marin Oran Valence (Espagne) seront lancés au courant du mois de novembre prochain, selon ce qu’a annoncé aujourd’hui à Alger la ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de la Communication, Imane-Houda Faraoun. Le coût global de ce projet, dont les travaux s'étaleront sur 14 mois, est estimé à 36 millions d'euros (26 millions pour le projet Oran-Valence et 10 millions pour celui d'Alger-Valence), a-t-elle ajouté. Interrogée sur l'annonce du lancement du projet Oran-Valence au moment où une coupure d'un câble sous-marin Annaba-Marseille avait affecté le trafic Internet national, la ministre a expliqué que le lancement du projet Oran-Valence, initié en 2009, avait rencontré des «difficultés administratives». Elle a précisé, en outre, que le volet financier du projet avait été ficelé la semaine dernière pour le démarrage «effectif» des travaux. Augmentation à 10 Go de la bande passante algéro-tunisienne, Mme Faraoun a indiqué, à cette occasion, que l'Algérie et la Tunisie sont convenues d'augmenter les capacités du câble de fibre optique reliant les deux pays de 150 Mégats octets à 10 Gigats octets qui sont «évolutifs». Ce renforcement de la bande passante permettra aux deux pays de «parer» à d'éventuels accidents pouvant survenir sur les câbles sous-marins, a-t-elle souligné, qualifiant cette ligne de «soupape de secours» pour les deux pays. L'Algérie dispose actuellement de deux câbles sous-marins en fibre optique Alger-Palma de 80 Go et Annaba-Marseille de 425 Go. Le trafic Internet en Algérie avait été perturbé entre jeudi et mardi derniers suite à une coupure du câble en fibre optique Annaba-Marseille, privant ainsi l'entreprise Algérie Télécom de 80% de ses capacités en bande passante internationale et affectant le trafic Internet au niveau national. Le Conseil de la concurrence s'autosaisira-t-il pour empêcher cette violation de la loi ?
Meriem Sassi