Les propositions du FCE pour diversifier l’économie nationale
Saisissant le contexte actuel marqué par une chute continue des prix du pétrole avec de graves conséquences sur la trésorerie nationale, le Forum des chefs d’entreprises a produit une étude sur la diversification de l’économie nationale. Un vœu pieux du gouvernement depuis plus d’une quinzaine d’années que les membres du FCE veulent concrétiser. Par cette étude, le FCE effectue son diagnostic de l’état de l’économie nationale, ses problèmes structurels et ses atouts inexploités. Dans cette étude présentée lors de la 4e édition de la Journée de l’entreprise algérienne tenue le 17 novembre à Alger, le FCE a sérié un certain nombre de mesures qui doivent être prises et d’autres qui doivent être clarifiées afin de créer un climat favorable à la diversification de l’économie algérienne, dépendante plus que jamais des exportations en hydrocarbures. «Même parmi les pays pétroliers, l’Algérie reste l’une des économies les plus concentrées sur les hydrocarbures. Le gap d’industrialisation par rapport à la norme d’industrialisation des pays pétroliers peut être évalué à 3-4 points de pourcentage du PIB», souligne cette étude, relevant ainsi le paradoxe algérien qui fait que les importations croissent constamment plus vite que le PIB depuis au moins quinze années (que ce soit en volume ou en valeur). Le plus préoccupant pour le Forum des chefs d’entreprises est que la propension à importer de l’économie nationale a doublé en 15 ans sans qu’elle soit le résultat d’une intégration dans les chaînes de valeur mondiales (CVM). Non seulement l’économie n’est pas diversifiée, mais même en hydrocarbures, le FCE constate le déclin de la production nationale notamment en matière de transformation. Par conséquent, il y a la dégradation du taux de couverture du marché intérieur par la production nationale, alimenté par l’importation. Ainsi, cinq produits industriels (raffinage pétrole, véhicules, barres et profilés en fer et acier, médicaments) concentrent plus du quart (26,7%) du total des importations, soit 14,7 milliards de dollars», précise-t-on dans cette étude, selon laquelle «18 produits épuisent la moitié du montant total des importations». Il est souligné que le taux de couverture du marché intérieur par la production nationale a connu une baisse continue de 2000 à nos jours. Cette dégradation a touché tous les secteurs industriels hormis l’activité des mines. Le FCE estime ainsi que les politiques économiques mises en œuvre ont induit des changements structurels qui ont entraîné un déclin relatif du secteur de l’agriculture sans pour autant conduire à l’émergence d’un large secteur industriel moderne. Cette orientation des changements structurels a eu plusieurs conséquences. Parmi elles, l’économie n’a pas pu réaliser son potentiel de productivité. Aussi, elle a entraîné une stagnation à partir de la fin de la décennie 70 du secteur industriel. L’économie est en deçà des normes d’industrialisation, même comparativement aux pays pétroliers, selon cette étude. Et comme conséquence, les marchés intérieurs sont faiblement couverts par la production industrielle nationale et les exportations de l’industrie manufacturière sont marginales en volume et en nombre, l’économie nationale demeurant l’une des plus concentrées sur les exportations dans le monde. Pour le Forum des chefs d’entreprises, qui œuvre à la création d’un véritable tissu économique national et à l’amélioration de l’outil de production, la politique industrielle de diversification devra allier les mesures transversales relatives à l’amélioration de l’environnement d’affaires et d’investissement, l’appui à la mise à niveau des PME indépendamment de leur secteur d’activité et l’appui à la compétitivité des PME avec une politique plus sélective ciblant des filières porteuses de densification industrielle et de modernisation technologique et des territoires qui peuvent contribuer à la diversification économique. Ces politiques ne sont pas indépendantes, mais complémentaires, précise le FCE dans cette étude, soulignant que « les politiques sectorielles ne peuvent réussir sans les réformes de l’environnement, l’ouverture au partenariat international et l’implication de l’Etat dans l’appui à la modernisation des entreprises». Le FCE s’inspire des expériences de développement réussies dans le monde. Il constate que, comme dans plusieurs pays, les ressources humaines sont libérées de l’agriculture, mais elles n’ont jamais rejoint l’industrie et les services. Le FCE propose, pour stabiliser la situation macroéconomique du pays, de mettre en place un cadre budgétaire pluriannuel qui trace le cheminement à moyen terme des comptes publics afin de s’assurer de leur soutenabilité, de substituer des règles budgétaires à la discrétion, notamment pour le niveau plafond du déficit public et le rapport des dépenses de fonctionnement à la fiscalité pétrolière et d’envisager l’adoption d’une loi organique qui constitutionnalise les nouvelles règles de gestion publique. En matière de rationalisation des dépenses, l’étude du FCE recommande, entre autres, de réviser les transferts progressivement à travers une nouvelle politique de redistribution des richesses. Comme elle suggère également de diversifier les sources de financement des infrastructures, de consolider l’investissement dans les infrastructures par le recours à la délégation de services prévue dans le nouveau code des marchés qui ne grève pas le budget de l’Etat, et d’assurer la coordination des politiques macro-économiques entre elles (la politique monétaire et de change de la Banque d’Algérie et la politique budgétaire du ministère des Finances), et entre les politiques macroéconomiques et les politiques industrielle et commerciale. Elle évoque, par exemple, la question de la dévaluation du dinar. Pour le FCE, les pouvoirs publics doivent veiller à freiner cette dévaluation de sorte qu’elle ne remette pas en cause la compétitivité des entreprises.
Rafik Meddour