Abdelmalek Sellal : «Il faut une réponse globale du monde civilisé face au phénomène Daech»
L’Algérie appelle à une réponse internationale globale contre la nouvelle organisation terroriste transnationale Daech. Dans un entretien publié aujourd’hui par le quotidien français Le Monde, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, considère qu’il n’y a plus de temps à perdre, invitant la communauté internationale à coordonner les efforts pour contrer cette menace terroriste. Le Premier ministre rappelle que son pays «a vécu une décennie de lutte contre le terrorisme dans les années 1990, qui a causé 200 000 morts, et appelle les Etats à dépasser leurs divisions politiques et religieuses pour en finir avec l’organisation Etat islamique (EI)». Il souligne que l’Algérie a enduré pire que ce qu’il s’est passé récemment à Paris. «Nous avons vécu en Algérie ce qu’il se passe aujourd’hui dans certains pays, notamment en France. Nous connaissons bien cette question. Mais à l’époque nous étions, pour ainsi dire, seuls à combattre le terrorisme islamiste. Certaines théories – comme le «qui tue qui ?» – remettaient même en cause l’action du gouvernement. Mais nous avons mis un terme à ces violences. Au début, c’est vrai, par une politique du tout-sécuritaire, mais qui a été suivie par une politique de réconciliation nationale prônée par le président Bouteflika et qui a donné des résultats, puisque le pays connaît depuis la stabilité», a précisé le Premier ministre qui considère que la lutte contre l’hydre terroriste ne peut être efficace que si tous les Etats s’y mettent. «Je sais que le président Hollande veut saisir l’ONU pour qu’une résolution sur la lutte contre le terrorisme soit adoptée. Aller aux Nations unies est la meilleure solution : il est nécessaire que l’ensemble des pays jouent le jeu dans cette affaire, sinon nous n’arriverons pas à venir à bout de ces groupes», a-t-il prévenu, appelant à ne pas perdre de vue la Libye qui risque de devenir pire que la Syrie. «Voyez ce qu’il se passe en Syrie : ces différents pays qui agissent par mouvements interposés. Daech profite de ces divisions internationales, et arrive, comble du comble, à exporter du pétrole pour acheter des armes. Ce sont des contradictions qu’il nous faut absolument dépasser», a-t-il insisté, considérant ainsi qu’il faut agir sur le plan sécuritaire, mais aussi agir pour éteindre les foyers où ce phénomène est né». Abdelmalek Sellal souligne la responsabilité de nombreux pays, notamment occidentaux dans la flambée de terrorisme. «Aujourd’hui, selon lui, il est impératif que les pays s’unissent pour le combattre et pour rétablir les équilibres. Il faut oublier les divisions politiques, religieuses». «Daech, ajoute-t-il, se nourrit de la lutte entre chiites et sunnites, des reliquats de la guerre d’Irak. Il faut avoir cette vision globale et se mettre d’accord pour que chaque pays fasse de la lutte contre le terrorisme sa priorité numéro un. Nous devons prendre conscience que le monde s’est mondialisé aussi sur le plan criminel», a-t-il relevé. Selon Abdelmalek Sellal, la plus grande inquiétude de l’Algérie actuellement, c’est le sort de la Libye voisine.
Les inquiétudes d'Alger
«J’espère que d’ici à la fin de l’année nous pourrons aider à mettre en place un gouvernement de transition en Libye qui puisse s’appuyer sur une force internationale. Le 1er décembre, nous réunirons tous les pays voisins, la Tunisie, le Niger, le Tchad, le Soudan, et l’Egypte», a-t-il annoncé, appelant tous les acteurs régionaux et internationaux à «pousser la mise en place de ce gouvernement, et lui donner des moyens pour stabiliser le pays sinon c’est un autre Daech qui sera aux portes de l’Europe». Car, a-t-il indiqué, «depuis les bombardements en Syrie, certains djihadistes sont revenus en Libye. L’Algérie joue le jeu de la sécurité et de la stabilité en Méditerranée. C’est notre principal objectif. Nous avons vécu le terrorisme. On utilisera tous les moyens à notre disposition pour le combattre», a-t-il conclu. Le Premier ministre a rassuré cependant sur la santé du président de la République et a réfuté les rumeurs selon lesquelles il était hospitalisé en France. «Non, le président est là et reçoit cet après-midi (jeudi 19 novembre) le Premier ministre maltais. Je suis en liaison tous les jours avec lui. Il n’a pas quitté le pays. Son état de santé est toujours le même. Il suit les affaires du pays et donne ses instructions au jour le jour», a-t-il répondu à une question selon laquelle le président Bouteflika aurait récemment quitté l’Algérie pour se faire soigner en Europe.
Rafik Meddour