Terrorisme «halal»
Par R. Mahmoudi – La «déradicalisation» à la saoudienne laisse pantois sur les méthodes utilisées et le choix des conseillers chargés de réinsérer les «égarés» (el-mugharrar bihim) et, du coup, révèle un des mécanismes de légitimation du terrorisme par le royaume wahhabite. Dans un compte rendu paru cette semaine, un quotidien saoudien rapporte les aveux de quelques membres d’un des comités dits de «conseils» institués depuis peu pour «prendre en charge» les jeunes soupçonnés de véhiculer des idées de djihad, et qui sont composés de professeurs et d’imams. On apprend qu’un des intervenants chargés de «déradicaliser» ces jeunes est un professeur du hadith qui enseigne à l'université Fahd du pétrole et des mines. Ce qui démontre, au passage, que l'endoctrinement est généralisé dans les établissements éducatifs en Arabie Saoudite, quels que soient le niveau et la nature du cursus. Dans ces séances, les membres du comité s’attellent à «redéfinir» le concept de djihad en le replaçant dans son «vrai contexte canonique». Car ils ont conclu que la plupart des djihadistes en herbe ont une conception «erronée» du djihad, fondée sur une interprétation «excessive» ou «impulsive». Ainsi, pour eux, les djihadistes interrogés ne font pas de différence entre le djihad «authentique» et la fitna,parce qu’ils ignorent, selon les professeurs, les percepts de l’islam en la matière. Or, dans leurs cours, ces derniers entretiennent sciemment la confusion autour des terres où le djihad est légitime : «mawatin el-fiten», par opposition à «mawatin el-djihad», sont les pays où les musulmans s’entretuent. A suivre cette logique, la Syrie et le Yémen doivent être considérés comme des terres de la discorde, donc interdites à la guerre sainte. Mais les prédicateurs saoudiens n’ont jamais défendu à leurs ouailles de partir faire le djihad dans ces pays. Au contraire, ils tentent de le régenter, de le rationaliser, pour mieux le légitimer et, par-là, le faire durer le plus longtemps possible. Ce qui explique sans doute cet afflux incessant vers la Syrie des mercenaires islamistes de toutes nationalités, parmi lesquels les Saoudiens tiennent le haut du podium, avec plus de 4 000 personnes, selon des statistiques officielles. Un des professeurs cités par le journal prend l'exemple de deux Saoudiens qui sont partis faire le djihad en Syrie, sans citer le nom du pays concerné. Les deux terroristes en herbe ont refusé de participer à des attentats suicides, car estimant qu'ils n'avaient pas à se faire exploser parce qu'ils étaient là-bas pour «mener le djihad», en se référant sur cette question à des citations de prédicateurs saoudiens. Cet intervenant très officiel justifie donc les actions terroristes autres que les actions kamikazes ! Tuer avec une kalachnikov et égorger, c'est halal,se faire exploser, c'est haram!
R. M.
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