Déclaration de Toufik, cacophonie politique, silence de Bouteflika : les Occidentaux déboussolés
Les rencontres d’ambassadeurs de pays occidentaux avec des leaders de partis politiques de l’opposition, à la demande des diplomates, sont généralement le signe que la situation dans notre pays est trop opaque pour pouvoir être comprise uniquement à travers la consultation des médias qui rendent pourtant compte, régulièrement, des positions des uns et des autres, et ne se privent pas de faire les lectures et analyses destinées à expliquer les événements. Mais cela ne suffit pas aux chancelleries qui ont besoin de visibilité pour établir leurs prévisions et leurs scénarios, surtout en ce moment, avec la situation floue et médiatiquement agitée qui prévaut. Tout a commencé à s’embrouiller avec l’affaire des généraux emprisonnés, un fait considéré comme gravissime en soi par la classe politique de l’opposition, et qui a également, au moins, mis dans la gêne des dirigeants au sein du pouvoir ou proches. Les analystes et les observateurs ont donné à ce fait une explication politique en rapport avec les luttes au sommet du pouvoir. Cette lecture politique a été confirmée par la réaction du général Nezzar à la suite du verdict condamnant le général Hassan à cinq ans de prison. Ses interrogations sur le timing d’une telle opération judiciaire ont appelé toute une série de questionnements restés sans réponse. Cette réaction a été suivie par la surprenante «incursion médiatique» du général Toufik qui s’est toutefois limité, comme il l’a voulu lui-même, à un plaidoyer en faveur de son ancien subordonné au DRS du temps où il le dirigeait et à appeler à agir en urgence pour corriger ce qu’il a qualifié d’injustice. Les sorties incongrues de Saïdani et les réponses violentes de Louisa Hanoune, ensuite la nouvelle prise de position publique des auteurs de l’initiative dite des «19-4» ont fini par enflammer la scène politique sur fond de rumeurs sur l'état de santé du Président puis son apparition à la télévision comme d'habitude, après de tels bruits. Mais le silence du Président face à ce tapage politico-médiatique a été pesant, le même qu’après le tollé soulevé par le passage en force de la loi de finances 2016, qualifié d’antisociale. Ce silence alimente le flou d’autant plus que le groupe «19-4» est convaincu que le Président n’est pas à l’origine des mesures prises par le pouvoir dernièrement. Devant cette situation, les officines étrangères sont dans le brouillard complet et ce sont donc les ambassadeurs qui sont contraints d’aller chercher directement non seulement les informations à la source, mais aussi se procurer auprès des leaders de l’opposition une grille de lecture pour décrypter cette abondance de faits qui ont déferlé comme une avalanche sur le paysage politique algérien. C’est ce qui a fait courir – et le ballet n’est pas près de s’arrêter – les ambassadrices des Etats-Unis, du Canada et de Suède vers les responsables de l’opposition. Notre site a rendu compte des derniers déplacements de trois ambassadrices : l’ambassadrice des Etats-Unis en Algérie, Mme Joan A. Polaschik, a demandé à voir le président de Jil Jadid, Sofiane Djilali. pour chercher à voir clair dans tout ce brouillamini, mais aussi apprécier au passage le poids de ce parti ; dans une démarche analogue, l’ambassadrice du Canada, Mme Isabelle Roy, est allée voir Ali Benflis, le président de Talaie El-Hourriyet, pour écouter son évaluation de la situation politique, économique et sociale que connaît l’Algérie. Même scénario, à peu près, pour l’ambassadrice de Suède en visite chez le président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Abderrazak Mokri. Les communiqués des partis concernés ont fait ressortir le caractère strictement politique de ces rencontres. Recherche d’explications ou suggestions apportées avec subtilité à ces partis ? Les communiqués ne le précisent pas.
Kamel Moulfi