Terrorisme et faux-culisme
Par R. Mahmoudi – Défiant toutes les voix qui se sont élevées depuis les derniers attentats de Paris pour demander l’arrêt de leurs rapports pervers avec le régime wahhabite, les gouvernements britannique et français continuent de lui apporter leur soutien multiforme et de plus en plus secret, voire détourné. C’est ce que révèlent deux faits scandaleux qui ont eu lieu au cours de cette semaine, respectivement dans ces deux pays pivots de l’Europe. A Londres, la diffusion par la très officielle chaîne de télévision BBC d’une information faisant état d’une nouvelle fourniture d’«armement pointu» livré par les Saoudiens à des groupes armés syriens dits «rebelles», retirée par la suite, a mis à nu la duplicité à laquelle s’adonnent les médias pro-gouvernementaux britanniques sur la question du terrorisme, en dépit du durcissement ambiant dicté par la conjoncture et, surtout, par les enjeux électoraux. Le reportage de la BBC évoquait cette information en citant un «officiel saoudien» sous le sceau de l’anonymat et selon lequel les services saoudiens ont livré des armes sophistiquées, dont des armes antichars guidées à trois milices armées. Reprenant les informations de sa source, le journaliste a mis l’accent sur le fait que ces livraisons ne concernaient nullement des groupes classés comme terroristes, à savoir notamment Daech et le Front d’Al-Nosra. Mais vérification faite, la direction de la chaîne s’est aperçue de la grosse «bévue» qu’elle a commise : une des milices concernées est composée justement de groupes officiellement proscrits, dont le Front d’Al-Nosra. Au-delà de la méprise, l’information dévoile à la fois la nature et l’ampleur du soutien assuré par un régime allié de Londres au terrorisme international. Une réalité que la BBC, porte-voix de la Grande-Bretagne dans le monde, n’aurait sans doute pas eu le réflexe de censurer, s’il n’y avait pas eu cette décision annoncée par le Premier ministre de s’impliquer désormais «plus sérieusement» dans la coalition internationale contre le terrorisme. Au même moment, en France, des membres du Conseil régional de la Lorraine ont dénoncé l’adoption d’une aide de 600 000 euros destinée à financer une formation du personnel militaire en Arabie Saoudite. Lors d’un débat en plénière, une élue du groupe Ecologie s’est insurgée contre cette décision destinée «à la guerre, à la construction de tourelles de chars». «On apprend à faire la guerre à des Saoudiens, alors qu’on n’est pas sûrs qu’on ne les retrouvera pas un jour en face de nous sur un terrain quelconque», s’est indignée cette élue. Et de rappeler que l’Arabie Saoudite «n’est pas quand même un pays exemplaire en matière de respect des droits de l’Homme», avant de s’interroger si «tous les Lorrains (ses concitoyens, ndlr) étaient d’accord pour aider les Saoudiens à utiliser des machines de guerre». Faut-il faire confiance aux officines occidentales lorsqu’elles affirment vouloir combattre le terrorisme islamiste ? Rien n’est moins sûr.
R. M.
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