Une contribution de l’Anaaf – A qui profite la dramatisation du score électoral du Front national ?

En brouillant la conscience citoyenne de beaucoup de Français, quelques politiciens assoiffés de pouvoir, de gauche et de droite, alliés à certains médias, ont une responsabilité énorme dans le succès électoral du Front national lors du premier tour des élections régionales du 6 décembre 2015.

En brouillant la conscience citoyenne de beaucoup de Français, quelques politiciens assoiffés de pouvoir, de gauche et de droite, alliés à certains médias, ont une responsabilité énorme dans le succès électoral du Front national lors du premier tour des élections régionales du 6 décembre 2015.
L'idéologie de la dramatisation dont ils ont fait preuve à propos de tout ce qui se rattache à l'islam en France a permis à la dirigeante du Front national de s'ériger en conscience morale et identitaire d'une France démoralisée, économiquement et socialement.
Ces apprentis sorciers du jeu démocratique en sont venus à imaginer le scénario catastrophe d'une guerre de religion dans laquelle nous serions entrés, créant ainsi une véritable «psychose publique» autour de l'islam en France, exploitant pour la légitimer un «faisceau de conditions» historiques, politiques, symboliques et surtout religieuses, pour favoriser la montée de l'intolérance, de l'expression de sentiments d'exaspération, de peur et de menace au sein d'une partie de l'opinion publique.
Le traitement médiatique de certains faits divers et des minorités concernées, par les photos, titres, sondages savamment étalonnés pour en orienter les résultats, parole donnée à tel acteur ou tel philosophe autoproclamé, les cadrages télévisés, dramatiques ou personnalisés, la mise en scène de la surenchère à propos de l'islam comme «enjeu politique» dans le cadre de la campagne électorale, ont contribué sans contredit à transformer le débat en «crise identitaire et de société». Ce traitement a exacerbé les préjugés populaires envers les citoyens français de confession musulmane, dont les demandes ont été désignées, dans plusieurs discours d'opinion, comme étant illégitimes et principales responsables des diverses turbulences identitaires et économiques que vit la société française.
Comment, donc, ne pas avoir une grille de lecture de l'hypothèque démocratique qui nous menace en France autre que celle que l'on s'échine à nous imposer dans les médias ? Certes, il n'est pas question pour nous de dénoncer tout manquement à l'éthique professionnelle de tous les médias, lorsqu'ils font usage de stratégies pouvant affecter la «cohésion sociale» ou encore le respect de la dignité et des droits de près de 10% de la population dans une société démocratique.
Mais il est évident que certains journalistes, alliés à certains politiciens, ont une large responsabilité sociale quant au maintien des débats publics dans les limites d'un minimum d'honnêteté intellectuelle à défaut d'une certaine objectivité.
Sur des questions qui affectent directement la religion musulmane et la dignité des citoyens qui s'en réclament au sein de «la fille aînée de l'Eglise», jamais aucune sanction, aussi peu sévère soit-elle, n'a jamais été envisagée ces dernières années envers certains médias aux couvertures foncièrement provocatrices, ou envers certains journalistes ou hommes politiques aux propos xénophobes et islamophobes, comme l'interdiction de publier ou de diffuser pendant un certain nombre de jours par les Institutions compétentes.
Cette complaisance partagée par les différentes classes politiques a permis à la dirigeante du Front national de se présenter, aux yeux de près de 30% des Français qui ont voté le 6 décembre dernier, comme la «femme providentielle» qui sauvera le pays.
C'est, semble-t-il, le pourcentage le plus élevé jamais réalisé par un parti politique extrémiste en France.
Avant la Seconde Guerre mondiale, le bouc-émissaire était principalement le juif ou le franc-maçon ; depuis, dans un monde globalisé, ces qualificatifs sont (fort heureusement pour les intéressés) interdits dans le vocabulaire politique pour mobiliser contre eux les foules. C'est le musulman, connoté de terroriste potentiel, qui les a remplacés pour justifier que la sécurité passe avant le social.
Pour les carriéristes de la politique et les spécialistes de la propagande, il est plus facile de pérorer sur les musulmans qui refusent de se conformer aux traditions françaises judéo-chrétiennes, sur les jeunes des banlieues qui vendent de la drogue et commettent des crimes, etc. L'idée poursuivie est de banaliser la nécessité de voter pour un chef charismatique, fusse une femme, qui se pose en défenseur des valeurs d'une France authentique, potentiellement menacée dans son territoire par des «comploteurs» pour la simple raison qu'ils sont de confession musulmane.
Dans tous les cas, cette idée du complot, exploitée à travers des expressions comme «cinquième colonne», «ennemis de l'intérieur», etc., a permis de mobiliser les troupes électorales en faveur de la patronne du Front national qui proclame à tue-tête son amour pour la France primitive, celle du «bon peuple français» et de son légendaire «bon sens».
Aveuglés par l'enracinement de l'islam en France, tous ces hommes politiques et ces journalistes qui agissent en véritables comploteurs, en encourageant les Français à voter pour un parti extrémiste, pour hypothéquer la démocratie française, ont-ils oublié que le fascisme considère illégitime toute forme de gouvernement qui n'est pas soumis au chef ?
Même si l'extrême droite pas plus que l'extrême gauche révolutionnaire n'ont pas forcément aujourd'hui la destruction des institutions comme objectif, la priorité politique du Front national et de ses animateurs est la recherche du bouc-émissaire et la mise en scène, sur un ton agressif, vindicatif et populiste, d'un complot qui serait fomenté par des ennemis de l'intérieur qui vivent en France, à savoir les citoyens de confession musulmane.
Une conclusion s'impose. En instrumentalisant l'islam et les musulmans de France, la gauche et la droite préparent la véritable bataille, celle des présidentielles. Le Parti socialiste et les Républicains espèrent secrètement que leur candidat respectif sera présent face à Marine Le Pen au premier tour, et l'emportera au deuxième tour en 2017.
On surjoue la dramatisation à propos des 30% des votants français pour culpabiliser les citoyens de confession musulmane en les rendant indirectement mais doublement responsables de la montée du Front national et des attentats terroristes commis en France ces derniers mois. L'objectif est de les maintenir à l'écart du pouvoir politique en France. On souhaite les faire taire et les rendre invisibles puisqu'ils sont considérés comme minorité trop visible.
En effet, les dirigeants des Républicains et ceux du Parti socialiste savent que les 30% réalisés par le Front national aux élections régionales du 6 décembre 2015, ramenés à la proportion des votants, nous donne un chiffre somme toute modeste de 9.9% de la population française qui est de tendance extrémiste. Voilà pourquoi tous les commentaires autour de ces élections régionales sont un répugnant festival du mensonge, de la propagande par slogans et de simplification des enjeux, orchestrés par les «décideurs politiques» du fonctionnement de la démocratie en France, relayés par certains journalistes et des médias complaisants pour empêcher tout débat en profondeur sur les véritables problèmes socio-économiques de la société française.
En mars 2017, lors de notre congrès national, nous sommes déterminés à faire entendre la voix des Français d'origine algérienne.
L’Alliance nationale des associations des Algériens de France

Pas de commentaires! Soyez le premier.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.