Lettre ouverte à certains politiciens algériens
Par Kamel Bourenane – Il est peut-être inutile de vous rappeler l’indignation, la tristesse et la peur des Algériens de l’irresponsabilité dont vous faites preuve en tout lieu, en tout temps et en toutes actions, ainsi que du rôle de générateurs du chaos dans lequel vous excellez et qui menace sérieusement le pays tout entier. Ce qui est certainement utile et urgent cependant, et pour la sauvegarde de l’Algérie, c’est de faire admettre un changement pacifique inéluctable à vos décideurs de l’ombre ou apparents, faiseurs de rois, de fortunes et de carrières dont vous, politiciens et politiciennes, par ignorance ou stratagèmes, vous êtes des exécutants raffinés de l’animation du chaos pour la survie du régime rentier, basé sur le clientélisme et la corruption. Aujourd’hui, mesdames et messieurs les politiciens, votre instrumentalisation à outrance par les clans qui se disputent le leadership et que les Algériens qualifient pudiquement de «mafia politico-financière» est un secret de polichinelle. De vos actions, de vos propos et de vos tâtonnements, il ressort tristement que, pour vous, «l’avenir» du pays est synonyme simplement d’horizon électoral ou plus concrètement d’une place et d’une part dans le partage de la rente, à cause de votre manque flagrant de culture démocratique, de pauvreté morale et de cupidité, qui sont d’ailleurs des traits communs qui vous caractérisent et qui vous unissent plus que le pays qui vous a pourtant tout donné. C’est pourquoi plusieurs experts de renom soutiennent mordicus et sans équivoque que les difficultés de l’Algérie d’aujourd’hui ne sont pas le résultat d’options politiques ou idéologiques, mais bel et bien du résultat de l’incompétence et de ses conséquences désastreuses de «la classe politique» dirigeante ou non dans sa majorité. Ce diagnostic sévère n’est pas fortuit et correspond bien au statu quo imposé et à la réalité typique de l’Algérie d’aujourd’hui. Les différents événements politiques vécus, depuis 1990, prouvent amplement le déficit flagrant de compétence et de conscience de cette «classe politique» algérienne dans sa majorité. Pour illustrer ce fait, il suffit de se référer à la dernière mascarade politique des clans du pouvoir algérien. Il y en a qui défendent Toufik et descendent en flamme Bouteflika, ou bien qui vantent Bouteflika et vitupèrent Toufik. Mais pour sortir l’Algérie strictement et définitivement de cette guerre des clans, ils sont rares ceux et celles qui défendent la pauvre Algérie et son malheureux peuple. Ils sont même très rares ceux et celles qui s’opposent ouvertement et clairement au régime politique des clans, pour défendre cette troisième voie qui est celle de la véritable démocratie, du consensus et d’un Etat de droit. A l’exception du FFS et de quelques politiciens indépendants ou structurés, qui incarnent une crédibilité certaine par leur autonomie d’action, leur discipline, leur savoir-faire politique et leur savoir-être, responsables, respectables et respectueux, il faut se l’avouer, des partis politiques et des politiciens actifs, qu’ils soient au pouvoir ou dans ce que certains journaux appellent «opposition» (opposition à qui et à quoi ?), sont animés par un militantisme affairiste et spéculateur, dont il est facile de réaliser l'étendue nuisible de leurs actions. Ces soi-disant politiciens prônent le changement générique et factice, en misant sur des réformes utopiques, éloignées de la réalité du terrain, en ayant pour seul et unique objectif l'escroquerie courtoise qui prend des proportions inquiétantes et menaçantes de toute la nation. Ces adeptes de la politique affairiste et de spéculation n’ont aucun respect pour le peuple et aux institutions du pays qu’ils parasitent. En effet, ces politiciens n’ont jamais une analyse objective des problèmes de la société, moins encore de vision claire et objective de la réalité de l’Algérie ou encore d’alternatives viables à offrir. C’est ce qui fait que la politique, chez nous, est justement ce qu’il y a de moins adapté aux préoccupations nationales ou régionales ; d’où le désintérêt total, voire même la méfiance du citoyen à l’égard du politique, car, concrètement, le peuple s’intéresse à la politique quand la politique s’intéresse à lui. Il est important de vous rappeler, mesdames et messieurs les politiciens, que semer des troubles, la confusion et l’incivisme est une facilité, alors que la modération est une discipline. Il est facile d’exagérer, mais bien plus difficile pour beaucoup d’entre vous de dégager une voie moyenne, de débattre, d’écouter, d’échanger, d’exposer, d’explorer, de trouver les compromis nécessaires, d’organiser et bâtir ce qu’on appelle «l’idéal démocratique» consensuel. Permettez-moi de vous préciser que l’Algérie d’aujourd’hui a besoin juste de politiciens qui considèrent que le rôle de la politique est de proposer un avenir et de le permettre, c’est-à-dire avoir une vision et agir pour qu’elle se réalise. Il ne s’agit pas d’agir pour agir, car c’est de l’agitation. Il s’agit d’agir dans l’action, c’est pour avoir une vision à respecter. Il s’agit, en outre, d’admettre et de considérer que la politique est l’art du compromis par exigence ou par nécessité, qui est habituellement le résultat d’un dialogue ouvert et sincère et non de compromission. Le compromis fructueux est toujours le moyen par excellence de viser et de favoriser le bien commun. Il est évident, mesdames et messieurs politiciens, que vous ne pouvez pas être au service de l’Algérie, c’est-à-dire le bien commun, et moins encore de répondre aux attentes du peuple, puisque vous êtes en tout temps liés aux services des forces occultes que les Algériens appellent communément les clans, qui sont votre raison d’être. Par voie de conséquence, vous n’êtes pas prêts à abandonner les privilèges indus et exorbitants dont vous bénéficiez. Mais cela est une grande erreur, car la nécessité d’un changement profond ne peut plus être entravée. Ce changement est inéluctable et il est tant attendu par les Algériens et pour les Algériens. La résistance prévisible à ce processus de changement et sa durée dépendront de vos réactions (passives, actives, pacifiques ou féroces), vous politiciens, comme actuels privilégiés à outrance de ce vieux système. Plus tôt vous, politiciens, comprendrez que rien ne peut être fait pour éviter ce changement, mieux ce sera, car il s’agit d’un impératif qui ne peut être repoussé à plus tard. Il est temps, en outre, que vous compreniez que rien n’est stationnaire, tout est en constante évolution et rien ne peut subsister pour toujours. La démocratie n’est pas un état stable et permanent, l’économie ou la dictature le sont encore moins. Les Algériennes et les Algériens, dans la diversité de leurs convictions et de leurs appartenances, attendent des gestionnaires intègres pour faire de l'Algérie un pays émergent et des visionnaires pour la faire entrer dans XXIe siècle. En clair, avec vous ou sans vous, le peuple algérien saura prendre des engagements consensuels, fermes et sans équivoque pour une Algérie démocratique, moderne, exigeante, équitable, inclusive, juste, ouverte, citoyenne, critique, créative, consciente, compétente et fière.
K. B.
Ndlr : Les idées et opinions exprimées dans cet espace n’engagent que leurs auteurs et n’expriment pas forcément la ligne éditoriale d’Algeriepatriotique.
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