Pour «en finir avec l’affaire de Tibhirine», il faut d’abord juger vos poseurs de bombes, Mme Taubira !
Arrogance. C’est le seul adjectif qui sied à l’attitude des responsables politiques et des magistrats français quand il s’agit de l’Algérie. Les propos tenus à Alger par la juge française de la Justice, Christiane Taubira, dont on aurait pu croire que l’origine guyanaise l’eût dotée d’une clairvoyance suffisante pour éviter son malheureux dérapage, confirment la mauvaise foi de la France officielle dans le dossier de la lutte contre le terrorisme. Cette ministre, qui ne peut ignorer le sinistre bagne de Cayenne qui fige à jamais la triste image du passé colonial de son pays d’adoption forcée, aurait-elle vendu son âme au diable en se reniant jusqu’à perdre sa dignité, en échange de quelque privilège dans la France métropolitaine ? Elle a semblé en tout cas ainsi, hier, au pays du million et demi de martyrs qui, contrairement à ses aïeux, ont choisi la voie de la liberté. Mais ce n’est pas l’histoire diamétralement opposée de ces deux pays, l’un indépendant et l’autre toujours soumis, qui interpelle dans cette dévotion au mensonge dont a fait preuve l’hôte de Tayeb Louh – à moins que ses propos aient été mal interprétés ; nous lui accordons le bénéfice du doute. Ce qui navre dans le comportement de Christiane Taubira, c’est son alignement aveugle sur les thèses fallacieuses du juge Marc Trévidic, bien que sa subjectivité flagrante ait été prouvée dans le traitement du dossier de l’assassinat par les hordes du GIA, ancêtre de Daech, des sept moines trappistes de Tibhirine, au summum de l’abjection dans son expression la plus sanguinaire en Algérie. En se concentrant sur ce dossier, la France officielle cherche à couvrir sa culpabilité dans la décennie noire et, subséquemment, sa responsabilité avérée dans la propagation de la violence islamiste dans le monde ; le terrible attentat du Bataclan étant l’aboutissement logique de la politique hasardeuse de Paris vis-à-vis de la nébuleuse fanatique dans les années 1990. Par cette focalisation, les responsables politiques français tentent, surtout, d’orienter les regards dans la direction opposée à celle qui lève le voile sur la complicité de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), impliquée jusqu’au cou dans le terrorisme. N’avez-vous donc pas lu, Mme Taubira, le témoignage de cet agent marocain des services d’espionnage français, qui explique dans un livre paru en 2006, comment cette même DGSE, qui «opère dans un cadre juridique et déontologique très strict», a armé les groupes islamistes en Algérie ? N’êtes-vous pas au courant de la gravissime affaire du convoyage de la bombe qui a servi à l’attentat-suicide ayant fait plus de quarante morts au boulevard Amirouche, le 30 janvier 1995 ? Le livre d’Omar Nasri, l’ancien informateur de la caserne Mortier, s’appelle Au cœur du djihad, paru aux éditions Flammarion, dont le siège, Mme Taubira, au quai Panhard et Levassor, se trouve à quelques stations de métro de votre bureau, place Vendôme. Lisez-le et faites-le lire par vos juges, faute, de notre côté, d’avoir pu convaincre les nôtres de s’y intéresser pour battre en brèche vos accusations captieuses et exiger des explications sur cette association de vos services secrets avec les criminels du GIA dans l’horreur commise en Algérie !
M. Aït Amara