Le monde musulman : une simple couleur de peau ?
Par Saâdeddine Kouidri – A les écouter, le musulman n'a pas de nationalité, il n'est ni un féodal, ni un bourgeois, ni un ouvrier. Il n'est rien pour ceux qui parlent du «monde musulman» comme d'une couleur de peau, jusqu'à faire croire que ce monde ne peut-être habité que par des terroristes. Et ce n'est pas en émigrant qu'il changera de peau. C'est en 1987, l'année de son assassinat, que Hussein Mroué affirme que le mouvement wahhabite lié au nom de Muhammed Ibn Abdelwahab Attamimi est le premier mouvement réformateur islamique des temps modernes. C'est l'utilisation de ce mouvement par les Ibn Saoud qui a produit des assassins et aujourd'hui des oppresseurs des peuples musulmans. Il me semble utile de rappeler ce jugement d'un philosophe engagé, tué pour ses idées à l'âge de plus de 80 ans, pour fixer cette autre vérité que le terrorisme n'est pas mû par la religion , comme le font croire les intellectuels des médias au service des états-majors de l'Otan, du Pentagone… mais de sa politisation. Ces intellectuels qui ont comme tâche de culpabiliser les honnêtes gens dans la quête invraisemblable du coupable, alors que nous savons que tout a commencé dans la guerre faite à la jeune République afghane par la réactualisation de l'islam politique comme arme de destruction massive aux mains du pouvoir des Etats-Unis, du royaume saoudien… Si l'histoire de cette guerre est déjà effacée des mémoires, il reste le souvenir de ce Saoudien largement médiatisé qui n'est autre que Ben Laden, qui a acquis sa renommée dans cette terrible guerre faite au peuple afghan. Ce terroriste était un bourgeois comme chacun le sait. Un écrivain se pose la question suivante : quand le président Hollande se rend à la grande synagogue de Paris pour écouter le prêche de Netanyahou, approuve-t-il le fait que cette synagogue a organisé une campagne de recrutement pour l'armée israélienne ? On doit comprendre aujourd'hui que Netanyahou n'en a cure, puisqu'il a été à la marche de Paris sans avoir été invité. La question est plutôt : combien de Franco-Israéliens sont enrôlés chaque année dans l'armée d'Israël ? Ce que Taubira, qui déclinait à Alger ce 21 décembre 2015 le nombre de «combattants étrangers» enrôlés par Daech, avait omis de nous donner. Certainement un nombre impressionnant, et même El Watan ne se serait pas trompé. Une autre aberration des intellectuels de service qui parlent du musulman postcolonial quand tout le monde sait que la deuxième capitale spirituelle des musulmans est Jérusalem. Elle est toujours colonisée et chaque jour elle l'est un peu plus avec des morts au quotidien, d'enfants qui résistent à l'armée d'Israël, une armée qui terrorise le peuple palestinien depuis des décennies. Si les stratèges des Etats-Unis ont opté pour l'utilisation de l'islam, c'est certainement pour deux raisons suivantes : le constat que le «monde musulman» avait des régimes politiques qui faisaient la guerre aux démocrates depuis leurs indépendances, quand leurs polices politiques étaient magnanimes y compris avec les islamistes qui dans les années 70 vitriolaient les femmes dans les rues d'Alger. On peut dire aujourd'hui que ces régimes antidémocratiques entretenaient le plus vaste des terreaux du terrorisme. La deuxième, c'est qu'avec ce «monde musulman», Israël peut accéder plus facilement à son projet du «monde juif», cet Etat d'Israël dont les frontières ne sont toujours pas définies. Leur victoire sur la jeune République afghane a encouragé la direction politique des étatsuniens à poursuivre sur la même voie pour remettre en cause tous les acquis du mouvement de libération nationale des années cinquante à soixante-dix. La résistance des peuples irakien, syrien, yéménite… n'est dans ce cas que la sauvegarde de leur indépendance politique. Les critiques à juste titre de leur politique antidémocratique pour les amener à faire un pas vers la démocratie a donné l'occasion à leurs ennemis, qui étaient aux aguets, de profiter lors de ce pas pour les déstabiliser dans le but de les anéantir. Suite à ces guerres, on peut affirmer que rien de positif ne peut se faire tant que les terreaux du terrorisme ne sont pas asséchés : un de ces terreaux reste la colonisation de la Palestine nourrie par le projet de l'Etat juif (religieux). La faim est pour certains un terreau du terrorisme ! Certes, la faim peut pousser aux larcins, mais de là à en faire le terreau des terroristes relève d'une ignorance crasse du phénomène. Le témoignage suivant va nous aider à faire la différence : «Au Salvador, les escadrons de la mort ne tuent pas simplement les gens. On les décapite, on place leurs têtes sur des piques et on garnit ainsi le paysage. La police salvadorienne ne tuait pas seulement les hommes, elle coupait leurs parties génitales et les fourrait dans leurs bouches. Non seulement la Garde nationale violait les femmes salvadoriennes, mais elle arrachait leurs utérus et leur en recouvrait le visage. Il ne suffisait pas d'assassiner leurs enfants, on les accrochait à des barbelés jusqu'à ce que la chair se sépare des os, et les parents étaient forcés de regarder.» Cette description n'est pas loin de celle que les terroristes algériens pratiquaient et qui rappelle la torture de l'armée française de Le Pen and Co pendant la lutte de Libération nationale 1954-1962 et aux lendemains des centaines de soulèvements populaires qui ont émaillé la période coloniale de 1830 à 1954 en Algérie. On peut dire puisque la colonisation n'a toujours pas été condamnée pour des crimes contre l'humanité, les nababs de la finance aujourd'hui continuent à tisser à l'aide de drones tueurs, de bombardements des villes et des égorgements, un étendard tricolore commun, aux couleurs des trois mondes religieux.
S. K.
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