Interview – Nordine Aït Hamouda : «Un groupe squatte le RCD pour des ambitions personnelles»
Algeriepatriotique: Dans votre première déclaration suite à votre «exclusion» du parti, vous dites que le RCD s’acheminait vers un rapprochement avec le FLN. Qu’est-ce qui vous fait dire cela ?
Algeriepatriotique: Dans votre première déclaration suite à votre «exclusion» du parti, vous dites que le RCD s’acheminait vers un rapprochement avec le FLN. Qu’est-ce qui vous fait dire cela ?
Nordine Aït Hamouda : Je dois de prime abord vous rappeler qu’officiellement aucune sanction n’est prononcée contre moi. Une parade est trouvée afin d’éviter de me confronter aux mensonges d’un groupe d’intérêts communs (GIC) squattant la structure du bureau régional pour des ambitions électoralistes personnelles. Ces pratiques dignes du parti unique, conjuguées au positionnement actuel de certains qui louent publiquement les mérites de «Aami Amar», mènent à une seule voie. Celle de l’allégeance.
La direction nationale du parti évite de commenter cette décision d’exclusion. Un arbitrage au sein du parti est-il encore envisageable pour résoudre ce conflit ?
Quand on vous dénie le droit de vous présenter devant une commission de discipline pour être entendu et pouvoir vous défendre, il ne faut pas espérer un arbitrage loyal. Le conseil national du parti se tiendra bientôt, j’appelle tous ses membres à demander des explications. Ils sont en droit d’avoir accès et prendre connaissance du rapport m’incriminant établi par le bureau régional de Tizi Ouzou. Comptant sur l’honnêteté de ces militants, j’espère pouvoir être éclairé sur les tenants et les aboutissants de cette cabale lancée contre un membre fondateur de leur parti.
Certains pensent que Saïd Sadi serait derrière cette décision…
Les membres du bureau régional, en annonçant cette décision aux présidents de section et aux militants, prennent la précaution de signaler à ces derniers que c’est Saïd Sadi et Mohcine Belabbas qui ont rédigé le message qui leur est adressé. Contrairement à ce GIC du bureau régional, moi je dispose de preuves irréfutables de ce que j’avance.
Vous parlez de «magouilles» et de «pratiques staliniennes». De quelles magouilles et de quelles pratiques s’agit-il ?
Les magouilles, ce sont les nouvelles mœurs politiques qui s’infiltrent et s’incrustent dans notre parti. La politique de la chkara (l’argent sale, ndlr). Quand une structure est squattée pour des ambitions démesurées, ça ne peut aboutir qu’à des pratiques staliniennes comme l’illustre bien mon cas inédit. On m’accuse de trahison tout en affirmant que je ne suis pas militant, pour ne pas me confronter à leurs mensonges. Même les dictatures organisent ne serait-ce que des simulacres de procès aux accusés. Ces pratiques staliniennes doivent être combattues.
Quel est, selon vous, l’avenir du RCD à la lumière de ce conflit interne qui semble prendre de l’ampleur ?
L’avenir du RCD est entre les mains de ses cadres sincères qui sauront le tirer de toutes ces bassesses et intrigues. La culture RCD primera sur la cooptation et l’opportunisme de ces charognards politiques. Nig webrid daw webrid, leqrar is d abrid.
Vous comptez lancer bientôt un appel aux militants. Projetez-vous de fonder un nouveau parti ou rejoindre une autre formation ?
Oui, très bientôt un appel fraternel sera lancé aux militants. Je ne compte pas créer un nouveau parti politique, le RCD restera mon seul parti et jamais je ne rejoindrai une quelconque formation politique. Cependant, je ne vais pas rentrer chez moi aussi facilement. Je continuerai à me battre sur le terrain et je serai comme toujours un porte-voix de la population contre les abus et les soumissions. Je compte lancer la création de la fondation colonel Amirouche prochainement.
Comment analysez-vous la situation politique actuelle dans le pays ?
Le pouvoir est sourd et ne veut pas entendre les cris d’alarme et de détresse. Avec un baril de pétrole sous les 28 dollars, le pays se fragilise de plus en plus. Ajoutez à cela une situation très confuse sur le plan politique. Tous les voyants sont au rouge. Je suis très inquiet quant à l’avenir de mon pays. Si nous n’arrivons pas, dans les plus courts délais, à surmonter et dépasser cette situation, la décision nous échappera et nous payerons très cher nos errements.
D’anciens chefs terroristes et dirigeants de l’ex-FIS tentent de réoccuper la scène politique nationale. Quel commentaire faites-vous ?
Si la scène politique est désertée, c’est tout à fait normal que ces gens tentent de l’occuper. La nature a toujours horreur du vide. Avec tous les moyens dont dispose cette nébuleuse à l’ère des réseaux sociaux qui favorisent la circulation rapide de l’information, les islamistes envahiront toutes les tribunes qui pourront leur être offertes. Cependant, il revient aux démocrates que nous sommes d’assumer nos responsabilités et de nous affirmer sur le terrain. Nous devons sortir de la politique des salons, nous rapprocher de la population et faire un travail de proximité et de sensibilisation. Nous devons faire valoir toutes les valeurs qui ont été le fer de lance de notre combat.
Vous avez été parmi les tout premiers patriotes à avoir appelé les citoyens à prendre les armes contre le GIA dans les années 1990. Ce phénomène a pris une envergure mondiale au fil des ans. Pourquoi, selon vous ?
Nous étions les premiers à répondre à l’appel de Saïd Sadi à prendre les armes et organiser la résistance citoyenne. Nous avons fait notre devoir de patriotes pour combattre et défendre la mère patrie, et nous continuerons à assumer nos responsabilités. Le phénomène a toujours été mondial. Il est évident que ceux qui combattent le terrorisme ne s’attaquent pas à sa matrice qui est l’islamisme politique – à ne pas confondre avec l’islam. On essaye de composer avec des courants appelés «modérés», or, comme aimait à le dire feu Mustapha Bacha, «un islamiste n’est modéré que quand il est faible».
Les moyens mis en œuvre par les dirigeants mondiaux sont-ils à la mesure de cette menace planétaire ?
Cette menace doit être combattue en amont et en aval. Je crois que les démocraties occidentales ne doivent pas tolérer les violations flagrantes des droits républicains et démocratiques, sous prétexte de la liberté de culte et d’expression. Oui à la démocratie et aux droits de l’Homme, mais attention aussi aux violations de ces concepts par ses islamistes intégristes qui utilisent la démocratie comme un marchepied pour tuer cette même démocratie une fois au pouvoir. En ce qui nous concerne, si l’école est réformée pour inculquer le savoir universel au lieu des cours incitant à la haine et le refus de l’autre, nous pourrons, dans peu de temps, nous prémunir de cette menace. La laïcité est le seul rempart à l’intégrisme.
Interview réalisée par M. Aït Amara