Article 51 : quid de la communauté algérienne à l’étranger ?
Par Bachir Ouazene – La communauté algérienne à l’étranger, et notamment en France, constitue une partie intégrante du peuple algérien. Son histoire se confond avec celle de l’Algérie et particulièrement dans l’avènement et le développement du mouvement de libération nationale (de l’Etoile nord-africaine au FLN). Faut-il rappeler que cette communauté s’est constituée par vagues successives depuis la fin du XIXe siècle aux années 1970, en fonction des besoins de l’économie française. Son implantation à travers le territoire français a ancré davantage son appartenance algérienne et le temps lui a donné une dimension plus affective. Faut-il rappeler aussi que nous sommes restés très attachés à notre identité et nos traditions algériennes ? Cet ancrage a fait que son adhésion à la guerre de Libération était, somme toute, un réflexe naturel des militants de la Fédération de France du FLN qui a pu mobiliser pratiquement l’ensemble des Algériens de France. Tout le monde reconnaît son apport à la guerre de Libération nationale, notamment dans le domaine financier. Depuis l’indépendance jusqu’aux années 1980, cette communauté a contribué, d’une manière importante, à l’apport de devises à l’Algérie. L’apport de l’émigration se situe en seconde position jusqu’en 1974, date de regroupement familial et l’arrêt par l’Algérie du flux migratoire. Le regroupement familial depuis cette année 74 n’a pas rompu les liens avec le pays d’origine, bien au contraire, ils ont été consolidés : chaque fois que l’Algérie a connu un événement malheureux, cette communauté s’est mobilisée dans un élan solidaire pour apporter son aide et son soutien à sa patrie et à ses compatriotes. Aujourd’hui dotée de compétences reconnues, elle est à même de répondre aux besoins de son pays d’origine si la demande lui est faite. Le code de la nationalité française basé sur le droit du sol fait que toute personne née en France est de nationalité française de plein droit. Les Algériens nés en France sont ipso facto français sauf avis contraire de leur part. Ils sont Algériens par le droit du sang, base du code de la nationalité algérienne. Cette double nationalité reconnue par les deux Etats constitue un véritable pont humain entre les deux rives de la Méditerranée et peut-être un avantage social, économique et politique, pour peu que l’on sache mobiliser les potentialités électorales qu’elle recèle en France, surtout quand on sait que cet électorat est numériquement très important, les Algériens de France étant évalués à plusieurs millions. L’article 51 du projet de révision de la Constitution semble ignorer cette partie du peuple algérien, puisqu’il exclut ses membres de certains emplois et fonctions supérieurs en Algérie. Cet article est-il le fait du hasard ? Il survient au moment où l’on parle de la déchéance de la nationalité française pour des binationaux reconnus coupables d’actes terroristes. Faut-il croire encore que cette communauté se sente doublement pénalisée par son pays d’origine, l’Algérie, et son pays de naissance, la France ? Face à cette double réalité et notamment aux effets négatifs de l’article 51, les Algériens de France et d’ailleurs risquent de se sentir exclus de la citoyenneté algérienne et se trouver en rupture avec leur pays d’origine. Ce qui est un grand dommage pour la politique algérienne sur le plan de son influence à l’étranger, et particulièrement en France si elle sait mobiliser ce poids électoral. A ce propos, nous sommes tentés de dire que l’Algérie se trouve dans l’état «d’un sans domicile qui dort sur un matelas d’or dont il ignore le contenu». De grâce, rendons à cette partie de l’Algérie toute sa citoyenneté et son appartenance à ce pays auquel elle est viscéralement attachée. L’histoire est là pour en témoigner ! Faut-il le rappeler si d’aucuns venaient à l’oublier ?
B. O.
Coprésident de l’Anaaf, ancien député de la communauté
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