Contrairement à une idée reçue : le DRS n’a jamais dépendu du ministère de la Défense nationale
Certains médias s’appuyant sur des sources «informées» persistent à croire que le désormais ex-Département du renseignement et de la sécurité (DRS) dépendait du ministère de la Défense nationale. Or, l’ancien ministre de la Défense nationale, le général à la retraite Khaled Nezzar, n’a eu de cesse de répéter que ce service a toujours été rattaché à la présidence de la République. Khaled Nezzar a relevé, à plusieurs occasions et dans différentes déclarations aux médias, l’amalgame qui est fait autour des prérogatives des services du renseignement algériens, expliquant que ceux-ci se trouvaient effectivement au siège du ministère de la Défense nationale, mais qu’ils n’étaient pas sous l’autorité du ministre de la Défense, mais du président de la République. Cette confusion est née de ce que le président de la République assume les fonctions de ministre de la Défense nationale et de chef suprême des forces armées. Si les services de renseignement partagent les mêmes locaux que le ministère de la Défense nationale, c’est parce que le président Houari Boumediene en a décidé ainsi après son coup de force contre Ahmed Ben Bella, en juin 1965. Boumediene avait alors cumulé les fonctions de président et de ministre de la Défense pour éviter de subir lui-même le même sort que son prédécesseur qu’il venait de renverser. Les services secrets ont, jusque-là, toujours joué un rôle prépondérant dans la vie politique nationale, dans le contexte postrévolutionnaire et monopartite, puis après l’«ouverture démocratique» qui a suivi les événements d’octobre 1988. Depuis, aucun président n’a jugé nécessaire de délocaliser le siège des services du renseignement, le maintenant aux Tagarins et entretenant ainsi – sciemment ? – une confusion entre l’ANP et le DRS, bien que le chef de ce département ne relevât jamais du chef d’état-major de l’armée et rendît compte directement au président de la République. En ayant décidé de passer à la deuxième phase de la restructuration du DRS, après les différents changements opérés au sein de ce service, conformément à un décret datant de 1989 – soit vingt-six ans après sa promulgation –, le président Bouteflika revient ainsi à une certaine «orthodoxie» en levant définitivement les équivoques provoquées par ce «mariage forcé» entre le ministère de la Défense nationale et l’ex-direction centrale de la sécurité militaire (DCSM), ancêtre du DRS. Service sensible, mais, surtout, source de puissance et de pouvoir, le renseignement a toujours servi de moyen de pression pour imposer les choix politiques. C’est ainsi que le président Bouteflika a été adoubé par ce service pour prendre le pouvoir et s’est appuyé sur lui pour s’y maintenir jusqu’à ce jour. Son quatrième mandat, il l’a consacré, dans le sillage de la révision de la Constitution qui va dans le sens opposé à ses orientations antérieures – la limitation du nombre de mandats présidentiels notamment –, à la réorganisation de ce service dont il assume désormais explicitement la paternité. Dans ce remue-ménage, en définitive, rien n’a changé hormis l’appellation et l’adresse. Il reste maintenant au président Bouteflika de séparer les fonctions de vice-ministre de la Défense nationale et de chef d’état-major de l’ANP pour éviter que cet enchevêtrement des prérogatives détenues par une seule et même personne donne lieu à des dérives antidémocratiques. Ce sera sans doute la troisième phase de cette réforme.
M. Aït Amara