La bourde d’Ouyahia : le directeur de cabinet de la Présidence ignore l’organigramme du DRS
Ahmed Ouyahia fait une entorse à sa règle habituelle, selon laquelle il ne mélange pas sa casquette de chef de parti avec celle de directeur de cabinet de la présidence de la République. Instruit visiblement de communiquer sur la dernière phase de restructuration des services secrets, Ahmed Ouyahia, qui a tenu aujourd’hui une conférence de presse à la fin des travaux du conseil national du RND, qu’il dirige par intérim, ne semble pas avoir été bien préparé pour éclairer la lanterne des journalistes, brouillés par l’absence de communication officielle et précise sur les changements opérés au sein des services de renseignement. Le directeur de cabinet de la Présidence s’est donc adonné à un jeu qu’il ne maîtrise visiblement pas. Ahmed Ouyahia a, certes, confirmé l’information selon laquelle le Département du renseignement et de la sécurité (DRS) a été dissous, tout en précisant que les services secrets sont désormais réorganisés en «trois directions distinctes». Mais en voulant être encore plus précis, il assure que «ces trois nouvelles directions sont directement rattachées à la présidence de la République». Une précision par laquelle il suggère clairement que ces trois directions, à savoir la Direction générale de la sécurité intérieure, la Direction générale de la documentation et de la sécurité extérieure et la Direction générale du renseignement technique, qui ont existé dans l’ancienne organisation (DRS), relevaient d’une autre entité, l’état-major de l’ANP en l’occurrence. Ce qui est archifaux. Ahmed Ouyahia vient donc de commettre une bourde qui trahit sa méconnaissance de l’organigramme des services secrets et qui prouve qu’il n’a été associé ni de près ni de loin à cette réorganisation des services secrets. Car le DRS, avec l’ensemble de ses structures, a toujours relevé de la présidence de la République. Si ce département était dépendant de l’état-major, son chef devait donc rendre compte directement à son responsable hiérarchique, qui ne pouvait être que le chef d’état-major. Or, comme ne cesse de le répéter l’ancien ministre de la Défense Khaled Nezzar, le DRS n’a jamais dépendu du ministère de la Défense nationale, encore moins de l’état-major de l’Armée. Et son chef a toujours rendu compte au président de la République en tant que son responsable direct. Le général Khaled Nezzar a, en effet, relevé, à plusieurs occasions et dans différentes déclarations aux médias, l’amalgame qui est fait autour des prérogatives des services du renseignement algériens, expliquant que ceux-ci se trouvaient effectivement au siège du ministère de la Défense nationale, mais qu’ils n’étaient pas sous l’autorité du ministre de la Défense, mais du président de la République. Cette confusion, visiblement entretenue à dessein par certains milieux pour donner à la restructuration des services de renseignement un aspect qu’elle n’a pas, est née de ce que le président de la République assume les fonctions de ministre de la Défense nationale et de chef suprême des forces armées. La direction centrale des services de renseignement a toujours été au niveau du ministère de la Défense nationale, depuis l’époque du président Houari Boumediene. Mais leurs fonctions et leurs missions sont sous l’autorité directe de la Présidence. En ayant décidé de passer à la deuxième phase de la restructuration du DRS, après les différents changements opérés au sein de ce service, conformément à un décret datant de 1989, le président Bouteflika lève ainsi les équivoques provoquées par ce «mariage forcé» entre le ministère de la Défense nationale et l’ex-Direction centrale de la sécurité militaire (DCSM), ancêtre du DRS. Ahmed Ouyahia aurait donc dû consulter d’abord les archives avant de «communiquer» sur un sujet qui semble ne pas être à sa portée.
Sonia Baker