L’ancien candidat à la présidentielle Kamel Benkoussa : «La situation du pays est très grave»
L’ancien candidat à la présidentielle d’avril 2014, Kamel Benkoussa, a estimé, dans un entretien accordé à Radio France Internationale et l’hebdomadaire Jeune Afrique, que l’Algérie qui «devrait être totalement indépendante des fluctuations des prix du pétrole» n’a «malheureusement pas réussi à réformer, à restructurer l’économie de manière à ce qu’elle puisse être à l’abri de ces fluctuations à l’international». Pour le trader algérien à la City de Londres, «la situation du pays est grave, très grave». Selon lui, «il y a eu plus de 900 milliards de dollars qui ont été investis sur les quinze dernières années», mais cela n’a servi à rien. «Si vous vous promenez dans les rues d’Alger ou d’autres villes d’Algérie, note-t-il, vous verrez qu’en termes d’infrastructures, il y a de grands manques. En termes de services à la santé, il y a de grands manques. A tous les niveaux. Vous vous posez la question : où sont passés ces 900 milliards de dollars ?» s’est-il interrogé, dubitatif sur la politique économique suivie par le président Bouteflika depuis son accession au pouvoir en 1999. A une question sur les entreprises publiques endettées, Kamel Benkoussa a déclaré que la majorité d’entre elles étaient déficitaires, en prenant l’exemple de Sonelgaz, qui est endettée à hauteur de 21 milliards de dollars. «Cette société veut contracter un nouveau crédit de huit milliards de dollars parce, dit-on, elle n’a pas la liquidité suffisante pour pouvoir assurer certains de ses projets. Une grande question se pose : quelle est la stratégie d’investissement mise en place ?» s’est demandé, sceptique, l’économiste qui affirme, par ailleurs, que l’Algérie «n’est pas un pays agricole, contrairement à ce qu’on dit souvent». «J’ai très longtemps défendu la création d’un fonds souverain algérien de 50 milliards de dollars», rappelle-t-il, en prenant l’exemple de la Chine ou de l’Inde «qui vont à la conquête de certains pays d’Afrique, notamment en Ethiopie et en Ouganda, pour obtenir des concessions sur 45 ou 90 ans et y exploiter des terres arables». Selon lui, l’Algérie devrait «s’inscrire dans ce modèle-là». Abordant la question des ressources hydriques, l’expert financier souligne que l’Algérie fait partie des pays à risque, prévoyant même un «été très difficile» : «L’Algérie, aujourd’hui, fait partie des pays à risque. D’ailleurs, cet été, je pense que les barrages seront à des niveaux très bas. On va avoir un été très difficile, notamment dans le Sud», a-t-il affirmé, quelque peu alarmiste. Il préconise que l’Algérie «réponde à ces problématiques d’eau», car, avertit-il, «sans cela, je crains que certaines populations du Sud émigrent vers le nord. Sachant qu’il y a de gros problèmes fonciers au nord et de gros problèmes de logements, je ne sais pas comment on pourrait gérer ces flux migratoires».
Karim Bouali