L’alarmisme du pouvoir et le «mur» de Saïdani désorientent les officines diplomatiques étrangères
A force de tirer sur la corde en dramatisant la situation sécuritaire de l’Algérie, le pouvoir et ses relais, le FLN en tête, ont fini par désarçonner les officines étrangères qui s’inquiètent désormais du double langage des autorités algériennes. D’un côté, l’armée et l’Exécutif rassurent que tout est maîtrisé et que l’Algérie est prémunie contre toute menace terroriste et contre toute tentative d’atteinte à l’intégrité territoriale du pays. De l’autre, le secrétaire général de la première force politique du pays, membre de l’alliance présidentielle, réunit à Alger trente partis politiques pour ériger un «mur national» contre les dangers «imminents» et «gravissimes» qui guettent l’Algérie derrière ses frontières et à l’intérieur même de celles-ci. Le double appel au «soutien» au président Bouteflika et à l’Armée nationale populaire résonne comme une alerte contre une tentative de renversement du pouvoir. La virulente attaque d’Amar Saïdani contre le directeur de cabinet de la présidence de la République, Ahmed Ouyahia, prête – sciemment ? – à équivoque et porte en son sein les germes d’une volonté de semer le doute et de créer la zizanie pour brouiller davantage la vision des citoyens qui ont déjà du mal à comprendre ce qu’il se passe en haut lieu et qui, éloignés ainsi des centres de décision, tournent le dos, à leur tour, à la politique. Les diatribes lancées par le patron du FLN contre son «rival» du RND sont intimement liées à l’échéance de 2019. C’est la succession à Bouteflika qui, en filigrane, explique cette passe d’armes dans laquelle Ahmed Ouyahia garde le silence pour le moment. Face à ces dérapages successifs d’Amar Saïdani – sabordage de l’alliance présidentielle, déclarations mal à propos sur la question du Sahara Occidental, défense zélée de Chakib Khelil, acharnement contre l’ancien chef des services de renseignement –, les partenaires étrangers n’arrivent plus à démêler l’écheveau et à avoir une grille de lecture claire et précise sur la situation politique qui prévaut dans le pays. A-t-on demandé à Ahmed Ouyahia de se faire violence et de se retenir d’ouvrir le feu sur le trublion du FLN qui crie à qui veut bien l’entendre qu’il est «solidement adossé» ? Le directeur de cabinet de la Présidence est-il en voie de subir le même sort qu’Abdelaziz Belkhadem pour une raison dont seul Saïdani détiendrait le secret ? Des questions auxquelles il ne faut pas espérer obtenir une réponse directe et qui épaississent davantage le brouillard et rendent la visibilité nulle aussi bien pour les Algériens que pour les étrangers qui avancent à tâtons dans leur partenariat avec l’Algérie, en dépit de leurs déclarations de circonstance, dithyrambiques et diplomatiquement correctes.
M. Aït Amara