Pression sur les forces de l’ordre et colère grandissante de la rue : le pays sur une poudrière ?
L’image d’un agent de l’ordre (notre photo) fuyant des supporters exaspérés, qui n’auraient sans doute pas hésité à le lyncher, n’augure rien de bon. L’acharnement de ces jeunes prêts à en découdre et la réaction effarouchée du membre des Unités républicaines de sécurité (URS), hier au stade du 5-Juillet, sont plus qu’inquiétantes. Elles démontrent, d’un côté, une forte pression subie par les forces de sécurité qui font face à des centaines de mouvements de colère sporadiques depuis 2011 et, de l’autre, une population qui bout et qui pourrait basculer dans la violence au moindre signal. La politique de la carotte et du bâton adoptée par le pouvoir, depuis 1999, a atteint ses limites et la crise économique et financière induite par la baisse des prix du pétrole a fait le reste. Déjà épuisée par un pouvoir d’achat en constante érosion, la population suit de loin, écœurée, les chamailleries politiques entre une opposition aphone, hétéroclite et incohérente, constituée d’un tout-venant de formations politiques, d’anciens membres du sérail et d’islamistes aigris, et un pouvoir en panne de stratégie pour sortir le pays du gouffre dans lequel il l’a plongé faute de vision clairvoyante, d’efficacité et de perspicacité. Le retour de Chakib Khelil dans ce contexte extrêmement fragile, a jeté de l’huile sur le feu, exacerbant la colère des citoyens qui ont suivi avec peu d’intérêt l’affaire Sonatrach, conscients que les accusés ne sont que des fusibles et que le procès n’est qu’une pâle copie de celui de Khalifa. Incapable d’acheter la paix sociale indéfiniment, le pouvoir finissant se trouve dans une impasse et met le pays en danger. S’il arrive, pour le moment, à convaincre les citoyens de la nécessité de souder les rangs face aux menaces extérieures, il n’en demeure pas moins que ce discours alarmiste ne pourra pas être tenu à l’infini. La perte de confiance des citoyens envers une classe dirigeante défaillante et sclérosée va en s’accroissant et le fil très fin qui continue de relier le peuple et le pouvoir risque de rompre définitivement si ce dernier ne sort pas de sa tour d’ivoire. Il y a péril en la demeure. Et ce péril ne vient pas que de l’étranger.
Karim Bouali