Saïdani et Ouyahia : deux caciques du système en fin de cycle qui seront sacrifiés avant 2019
La réaction d’Ahmed Ouyahia au communiqué d’un groupe de redresseurs au sein du Rassemblement national démocratique (RND) aux destinées duquel il préside signifie que le directeur de cabinet de Bouteflika sent le vent tourner. Habitué à garder le silence face aux attaques dont il est l’objet, Ahmed Ouyahia s’est fendu d’un communiqué quelques heures à peine après la déclaration des frondeurs réclamant le report du congrès extraordinaire qui devrait introniser le successeur «provisoire» d’Abdelkader Bensalah. Mais les choses ne semblent pas se passer comme prévu. Connaissant le système de l’intérieur et ayant lui-même participé à de nombreux coups de Jarnac durant sa longue carrière politique dans le sérail, Ahmed Ouyahia sait que les mouvements de redressement improvisés n’existent pas. Le coup vient forcément de l’extérieur du parti, doit-il penser. Et il n’aura pas tort de suspecter un début de putsch dont l’issue dépendra des cercles qui sont derrière la fronde au sein du parti. Car la colère de ses militants qui dénoncent des «dérives» et de «graves dysfonctionnements» est venue se greffer à un tir groupé des dirigeants du parti allié, le FLN, qui accuse le directeur de cabinet de la présidence de la République d’«infidélité» envers Bouteflika pour avoir refusé d’offrir un blanc-seing à Amar Saïdani lors de son show politique de la Coupole, le 30 mars dernier. Mais Ahmed Ouyahia n’est pas le seul à affronter l’ire de ses militants. Le secrétaire général du FLN a, lui aussi, maille à partir avec la vieille garde du parti qui ne cesse de crier à l’«appropriation» du FLN par un groupe d’ «usurpateurs» et à son «dévoiement» de sa ligne historique. Les Abderrahmane Belayat, Abdelkrim Abada et autre Salah Goudjil sont désormais rejoints dans leur divorce d’avec le tonitruant Amar Saïdani par un ministre FLN, Tahar Khaoua, qui se rebelle contre le chef contesté du parti. Il vient de le faire savoir à nouveau dans une récente interview à une chaîne de télévision privée. Les deux partis de l’alliance présidentielle semblent se diriger droit vers une implosion qui changera, à coup sûr, la donne en 2019. Il n’est pas certain que les chefs de file du FLN et du RND conduisent encore ces deux formations politiques lors de la prochaine élection présidentielle. Amar Saïdani et Ahmed Ouyahia sont à la fin de la mission qui leur a été assignée depuis le tout premier mandat d’Abdelaziz Bouteflika, puis sa maladie. La nouvelle Constitution ayant été réformée à sa guise par le président, la prochaine étape consistera à mettre en place un nouveau paysage politique débarrassé des dinosaures et des caciques en prévision de l’échéance électorale que le locataire d’El-Mouradia voudrait laisser «propre» derrière lui. Amar Saïdani et Ahmed Ouyahia feront partie, avec d’autres, des fidèles qui seront sacrifiés sur l’autel du changement prévu par le président Bouteflika à la veille de la fin du cycle politique entamé en 1999.
Karim Bouali