La mission de Chakib Khelil
Par Rabah Toubal – Du haut de ses 78 ans, Chakib Khelil, accusé de malversations et dont le dossier est toujours ouvert au niveau de la justice algérienne, ne mentirait pas lorsqu'il déclare ne pas avoir l'intention de se présenter à la prochaine élection présidentielle, sans doute anticipée, vue la dégradation rapide de l'état de santé du président Bouteflika. En effet, sa mission principale, à travers la tournée qu'il est en train d'effectuer auprès des zaouïas, serait de s'assurer de l'allégeance indéfectible de ces confréries – généreusement financées par Bouteflika dont elles ont soutenu les quatre mandats – au candidat qu'il adoubera. Les arguments développés par Chakib Khelil auprès des dirigeants des zaouïas qu’il a visitées auraient une forte connotation régionaliste et sont dangereux pour la cohésion, la stabilité, la sécurité et l'unité nationales, sérieusement menacées par les agissements irresponsables des aventuriers qui pratiquent une fuite en avant suicidaire. L'honneur d'annoncer le nom du candidat du système à la prochaine élection présidentielle reviendra sans aucun doute à Amar Saïdani, le très contesté secrétaire général du FLN, lui-même accusé de corruption et de détournement de deniers publics par Rachid Nekkaz, le candidat malheureux à la présidentielle du 17 avril 2014. Il sera soutenu par les partis politiques et les diverses associations alliés et obligés du pouvoir et ses serviteurs zélés dans tous les secteurs. L'administration – les ministères de l’Intérieur et de la Justice et le Conseil constitutionnel notamment –, soumise à la volonté de ce pouvoir, fera le reste pour que son candidat passe haut la main, par la force et la fraude massive s’il le faut, malgré les récriminations inégales de l'opposition. Quant aux inévitables critiques qui émaneront de l'Union européenne, de la France et des Etats-Unis particulièrement, elles seront démagogiquement imputées au fait que ces puissances voudraient se venger du soutien de notre pays à la Syrie. La dramatisation par la partie algérienne de la tension qui caractérise les relations algéro-françaises à cause des photos du journal Le Monde et de Manuel Valls s'inscrirait dans cette perspective. L'opposition et la société civile algériennes indépendantes du pouvoir pourraient-elles éviter à notre pays ce scénario catastrophique qui le plongerait dans une crise éminemment destructrice ?
R. T.
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