La marmite algérienne
Par Rabah Toubal – Il ne faut pas être devin, cheikh dans une zaouïa locale ou lauréat d'une prestigieuse université ou école internationale pour savoir que, sous les effets conjugués de l'incompétence notoire de ses dirigeants et des influences néfastes multiples qu'elle a subies de la part de ses partenaires étrangers, l'Algérie est devenue aujourd'hui une nation ultra-vulnérable. Notre pays n'est pas à l'abri d'un effondrement général, à moyen terme, si les causes objectives de cette fragilité, obstinément niée par le gouvernement, continuent à être réunies ou s'aggravent davantage. En effet, en raison des décisions prises sans l'association du peuple algérien ou de ses représentants légitimes, la dépendance multiforme de notre pays de l'étranger est allée crescendo, pour atteindre son paroxysme ces dernières années, pour au moins six raisons.
La désindustrialisation sauvage – bradage du tissu industriel non négligeable, que l'Algérie a laborieusement constitué entre 1965 et 1980 – par une restructuration et une privatisation bâclées des entreprises économiques publiques, nationales et locales, qui n'étaient pas toutes en état de faillite, souvent cédées au dinar symbolique à des opérateurs économiques algériens ou étrangers, moyennant bakchich.
La destruction massive des ressources humaines algériennes, au nom d'un népotisme et d'un régionalisme qui frisent le racisme, la corruption généralisée, le pillage et le bradage des ressources naturelles non renouvelables de notre pays, la dilapidation insensée de ses ressources financières, qui ont connu un accroissement important grâce à un renchérissement exceptionnel des prix du gaz et du pétrole.
La dépendance dramatique des exportations de gaz et de pétrole, qui génèrent encore plus de 98% des recettes en devises étrangères du pays.
La régression dans de nombreux domaines où notre pays collectionne les mauvais classements, l'obscurantisme qui regagne du terrain à la faveur de la panique et de la paranoïa du pouvoir, qui refuse d'assumer le désastreux bilan de son long règne. Lequel règne a considérablement aggravé la vulnérabilité de notre pays dans de nombreux domaines et pérennisé la précarité de la société algérienne.
L'expansion effarante de maux et fléaux sociaux graves que ni l'école ni l'université algériennes sinistrées n'ont pu atténuer, au sein d'une jeunesse livrée au chômage endémique, réduite à la fuite du pays et ravagée par ces fléaux dévastateurs.
La fuite en avant suicidaire des tenants du pouvoir, qui fourvoie notre pays dans une impasse dangereuse, grosse de tous les risques pour sa cohésion, sa stabilité, sa sécurité et son unité, aujourd'hui plus que jamais menacées.
Il est dès lors légitime de s'interroger sur la nature et la composition du menu que nous réserve la marmite algérienne.
R. T.
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