La page n’est pas tournée
Par Kamel Moulfi – Chaque année, la commémoration des massacres du 8 mai 1945 rappelle que le contentieux historique avec la France, créé par l’occupation coloniale et la série de crimes qui l’ont accompagnée, est toujours ouvert et que la page est loin d'être tournée. Le 8 mai 1945 et les jours qui suivirent, ce sont 45 000 Algériens qui ont été massacrés et l'histoire devra leur rendre justice un jour ou l'autre. Le temps ne peut pas et ne doit pas effacer un crime contre l'humanité d'une telle horreur et d'une telle ampleur. Les historiens ont rapporté des faits d’une atrocité inqualifiable. «Les légionnaires prenaient les nourrissons par les pieds, les faisaient tournoyer et les jetaient contre les parois de pierre où leur chair s’éparpillait sur les rochers ; les corps de prisonniers exécutés par rangées, dans le dos, étaient précipités du haut d’une falaise ; des corps ont été brûlés dans les fours à chaux ; des groupes de prisonniers enchaînés ont été écrasés sous les roues des chars ; des hommes sur le point d’être exécutés contraints par la soldatesque française de creuser les fosses de ceux qui ont été assassinés avant eux.» En février 2005, près de quarante ans après les faits, l’ambassadeur de France en Algérie, en visite à Sétif même, avait parlé, à ce propos, de «tragédie inexcusable». Mais ce ne sont pas des excuses que les Français doivent aux Algériens ; c'est une condamnation claire de cet acte barbare pour qu'on puisse enfin parler de relations assainies et apaisées entre l'Algérie et la France. D’ailleurs, il n’y a pas que les massacres du 8 mai 1945 dans le contentieux. Durant la période coloniale, chaque fois que les Algériens ont manifesté pacifiquement leur volonté de libérer leur pays de l’occupation, la répression menée par l’armée française, d’une sauvagerie extrême, a pris systématiquement des dimensions qui dépassent celles du crime contre l’humanité au sens que lui donne le droit international. De plus, les actes inhumains, comme les «enfumades», à titre d’exemple, n’étaient pas dus à des dérives dans des cas isolés. Ils étaient inscrits dans la politique officielle de la France coloniale et commis sous les ordres directs de criminels placés très haut dans la hiérarchie de l’armée française. Aujourd’hui, ce que les Algériens attendent de la France, c’est tout simplement une condamnation sans ambiguïté de ces comportements criminels et de leurs auteurs.
K. M.
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