Selon Le Monde : le cimentier Lafarge travaille avec Daech
Officiellement, la France est en guerre contre Daech. Mais ses entreprises ne se gênent pas à faire des affaires avec cet ennemi déclaré. Selon une enquête réalisée par le quotidien Le Monde, le Groupe français Lafarge, qui exploite plusieurs cimenteries en Algérie, a travaillé avec Daech en Syrie. Cette enquête publiée ce mardi 21 juin démontre que le cimentier français, implanté à Jalabiya, dans le nord de la Syrie, «a payé des taxes à l’organisation Etat islamique entre 2013 et 2014». Lafarge justifie cela par son souci de continuer à fonctionner pendant la guerre. «Inaugurée en 2010, la cimenterie de Jalabiya, dans le nord-est de la Syrie, était le fleuron du cimentier français au Proche-Orient», explique Le Monde. Mais l’année suivante, la guerre civile a éclaté. Et Lafarge n’a pas hésité un instant à se rallier au «maître des lieux» afin de rentabiliser au maximum son usine. Pour le cimentier français, dans les affaires il n’y a pas de principes mais des gains. Quitte à participer au financement «indirect» de l’Etat islamique qui sème la mort en Syrie, en Irak et partout dans le monde. Lafarge ne s’est pas contenté de payer «des petites taxes». Selon l’enquête du Monde, à partir de 2013, il verse des «checkpoints (droits de passage)» à Daech. Il achetait également le pétrole de cette organisation terroriste. Le financement de Daech par Lafarge a continué jusqu’au mois de septembre 2014, date à laquelle l’Etat islamique a carrément pris possession du site. Et même après, «un intermédiaire a proposé au Groupe français de relancer la cimenterie sous la protection de l’EI et en échange d’un partage des bénéfices». Sauf qu’entretemps le site est tombé entre les mains de la milice kurde des YPG, soutenue par la coalition internationale contre l’EI. «Désormais, la cimenterie désaffectée sert de base aux forces spéciales occidentales, françaises, américaines et britanniques, qui soutiennent discrètement les forces kurdo-arabes dans leur offensive en cours contre les djihadistes à Manbij et Rakka», précise le journal Le Monde. Ce qu’il s’est passé en Syrie n’est pas exceptionnel. C’est même la règle chez certaines compagnies occidentales à l’appétit démesuré. Comment donc les gouvernements occidentaux qui laissent de grandes compagnies comme Lafarge continuer leurs affaires en traitant avec les groupes terroristes se demandent d’où vient l’argent de Daech ? Comment disent-ils qu’ils sont en guerre contre l’Etat islamique et laissent leurs multinationales s’approvisionner en pétrole que commercialise cette organisation terroriste ? L’Algérie a vécu cette situation dans les années 1990 quand le Groupe islamique armé (GIA) qui massacrait des populations civiles organisait dans les rues de Londres des collectes d’argent pour financer ses actions terroristes en Algérie. D’ailleurs, au moment où l’armée algérienne subissait un embargo international de vente d’armes et de munitions, le GIA possédait des équipements militaires et des munitions qui lui permettaient d’organiser des attentats à la bombe, des embuscades et des massacres de villages entiers de populations sans défense. Le cas de Lafarge, qui n’est pas le seul, met à nu le double discours de l’Occident, qui semble utiliser la menace terroriste et l’oriente selon ses propres intérêts. On ne donc pas parler d’un front international contre le terrorisme tant les sources de son financement ne sont pas taries. C’est le combat diplomatique que mène actuellement l’Algérie.
Sonia Baker
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