L’avocat de Nadia Matoub : «La loi sur la réconciliation nationale exclut Hattab»
Maître Samir Sidi-Saïd, avocat de l’épouse du défunt Matoub Lounès, a déclaré à la chaîne de télévision BRTV qu’une plainte a été déposée au tribunal d’Alger contre l’ancien «émir» de l’AIS, Hassan Hattab. Pour Me Samir Sidi-Saïd, la plainte a été déposée «conformément aux procédures pénales en vigueur contre Hassan Hattab pour que la justice ouvre une nouvelle instruction». Selon lui, Hassan Hattab, «en tant qu’émir et en tant que terroriste, a revendiqué l’assassinat de Matoub Lounès ouvertement». Dès lors, a-t-il expliqué, Mme Nadia Matoub «ne pouvait pas rester les bras croisés à partir du moment où il a admis qu’il était le commanditaire de cet assassinat». Me Sidi-Saïd a affirmé que l’article 2 de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale exclut de fait Hassan Hattab des dispositions de ce texte. L’article en question stipule, en effet, que l’extinction des poursuites à l’encontre de tous les individus qui mettent fin à leur activité armée et remettent les armes en leur possession ne s’applique pas aux individus impliqués dans les massacres collectifs, les viols et les attentats à l’explosif dans les lieux publics. A la question de savoir pourquoi avoir attendu dix-huit ans après l’assassinat de Matoub Lounès pour porter plainte contre Hassan Hattab, l’avocat a expliqué que cette action en justice «est légitime», Mme Nadia Matoub ayant décidé d’agir «parce qu’elle a constaté que la justice n’a pas réagi alors qu’un individu, en l’occurrence Hassan Hattab, a affirmé ouvertement être derrière l’assassinat de Matoub Lounès». Par ailleurs, «il n’est jamais trop tard pour que la vérité éclate», a estimé Me Sidi-Saïd qui a souligné que la veuve du chantre de la chanson engagée d’expression amazighe «va défendre jusqu’au bout son époux et c’est son droit». «Quelle que soit la situation et nonobstant les textes invoqués ici et là (la charte, ndlr), il y a un assassinat, il y a mort d’homme, il y a un crime», a insisté l’avocat de Nadia Matoub, qui a rappelé que cette dernière est elle-même victime de l’attentat qui a visé son mari. «Elle a été blessée et a séjourné longtemps à l’hôpital, ses sœurs également», a relevé Me Sidi-Saïd, selon lequel «Mme Nadia Matoub a ainsi le droit de se constituer partie civile pour défendre ses droits et défendre aussi le défunt Matoub Lounès dont elle est la veuve». L’épouse de Matoub Lounès, assassiné à Thala Bounane le 25 juin 1998, demande que l’article 2 de la loi sur la réconciliation nationale soit appliqué. La démarche consiste à demander l’ouverture d’une enquête concernant Hassan Hattab. Me Samir Sidi Saïd, qui ne nie pas que la Charte pour la paix et la réconciliation nationale «a été bénéfique», a affirmé, néanmoins, que l’épouse du défunt «ira jusqu’au bout pour que le doute soit définitivement dissipé et que la vérité éclate au grand jour» et «se battra juridiquement en suivant les procédures en vigueur pour que justice soit rendue au défunt Matoub Lounès». Si pour Me Sidi-Saïd un procès a déjà eu lieu à Tizi Ouzou et que des accusés ont été jugés, cependant, «l’action publique aurait dû s’autosaisir automatiquement après les déclarations de Hassan Hattab». «De plus, a-t-il ajouté, lors du premier procès, Hassan Hattab ne faisait pas partie des prévenus». Le nouveau procès est donc intenté à Hassan Hattab pour les propos qu’il a tenus et qui l’impliquent directement dans l’assassinat de Matoub Lounès. «Juridiquement parlant, il subsiste beaucoup de zones d’ombre dans ce dossier», a encore souligné l’avocat de Mme Matoub. «Je ne comprends pas pourquoi la justice n’a pas exigé un complément d’enquête sur la base de l’aveu de Hassan Hattab», s’est-il interrogé, expliquant que la plainte contre l’ancien «émir» du GSPC a été introduite auprès du tribunal d’Alger bien que Matoub ait été assassiné à Tizi Ouzou, parce que Hassan Hattab «réside» à Alger et ses déclarations ont été faites à Alger également. «Par ailleurs, ce choix est dû au fait que le premier procès s’est déroulé à Tizi Ouzou et que le parquet général de cette juridiction ne s’est pas autosaisi suite aux aveux de ce dernier», a encore affirmé l’avocat, tout en soulignant qu’il a «néanmoins confiance en la justice algérienne». «L’épouse du défunt Matoub Lounès attend de ce procès que l’enquête soit menée dans la transparence et la rigueur», d’autant que «Hassan Hattab a tenu des propos qu’il n’a pas démentis ultérieurement», a conclu Me Samir Sidi-Saïd.
Karim Bouali
Erratum : nous nous excusons auprès de nos lecteurs pour la confusion entre les terroristes Hassan Hattab et Madani Mezrag que rien ne distingue.
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