Dallas ou «tag ‘ala men tag»
Par Kamel Moulfi – Il aurait pu être un héros comme la mythologie américaine sait en fabriquer pour honorer ses soldats qui combattent le «mal» dans les autres pays. Mais il ne le sera jamais. Ce jeudi, Micah Xavier Johnson, Noir américain de 25 ans, ancien soldat réserviste ayant servi en Afghanistan de novembre 2013 à juillet 2014, a retourné son arme contre son camp en tuant cinq policiers à Dallas, avant d’être lui-même abattu. Son motif se lit à la couleur de sa peau: venger les deux Noirs morts sous les balles des forces de l’ordre, Philando Castile, 32 ans, dans le Minnesota, au nord des Etats-Unis, et Alton Sterling, 37 ans, à Bâton-Rouge, la capitale de la Louisiane, dans le Sud. Son acte «isolé» n’a rien à voir ni avec le terrorisme islamiste qui a frappé à Orlando, ni avec une organisation de dimension internationale, du type Daech.
Mais à l’ère d’internet et des réseaux sociaux, l’organisation traditionnelle n’est plus indispensable pour agir de cette façon. La question qui se pose est plutôt de savoir si la lutte contre le racisme aux Etats-Unis va prendre une forme armée. Ce qui a été découvert au domicile du tireur le laisse penser : matériel pour fabriquer des bombes, gilets pare-balles, armes et munitions. En 2016, 123 Noirs ont été tués par la police sous différents prétextes. Les Noirs semblent décidés à ne plus se laisser faire. Hier, vendredi, des manifestations antiracistes pacifiques ont encore eu lieu dans plusieurs grandes villes américaines, comme New York, Atlanta, Philadelphie, San Francisco, Phoenix. Face à une police et à une justice aussi raciste l’une que l’autre, et en l’absence d’une intervention des hautes autorités américaines, les Noirs ont-ils choisi de régler les comptes eux-mêmes ?
Les Algériens ont une idée de ce qu’est Dallas, cet «univers impitoyable» qui a été introduit en feuilleton télévisé dans leurs foyers dans les années 1980, à l’époque de feu l’ex-président Chadli Bedjedid, pour appuyer sa nouvelle doctrine économique du «tag ‘ala men tag». La tuerie de jeudi dans cette ville ne nous étonne pas.
K. M.
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