Libération du général Benhadid et du directeur de la chaîne Al-Watan : recul ou changement de stratégie ?
Le général à la retraite Hocine Benhadid a été remis en liberté hier lundi, après près de dix mois de détention provisoire et le refus de plusieurs demandes de liberté conditionnelle. En détention provisoire depuis trois mois, Djaffar Chelli, directeur de la défunte chaîne de télévision privée Al-Watan TV (proche du MSP), a retrouvé le même jour sa liberté. La libération de ces deux détenus a été interprétée par certains observateurs comme un geste d’apaisement de la part d’un pouvoir qui redouble de répression et d’arbitraire, et qui essuie de vives critiques aussi bien à l’intérieur qu’à l’étranger après, notamment, l’emprisonnement de deux responsables de KBC et d’une cadre au ministère de la Culture. Après avoir montré ses biceps en tirant sur tout ce qui bouge, le pouvoir, acculé par de sérieux problèmes économiques aux conséquences sociales désastreuses, se rend visiblement compte qu’il a forcé le trait et été trop loin dans sa volonté de faire traire les voix discordantes. La question est de savoir s’il s’agit d’un changement de stratégie de la part du pouvoir pour «mieux affronter la crise» ou tout simplement d’une soupape qui lui permettra de faire baisser la pression qui pèse sur lui. Cette question trouvera sa réponse dans le traitement qui sera réservé à tous les autres détenus.
D’ailleurs, on pourra connaître les véritables intentions du pouvoir demain, lors de l’examen de la demande de liberté provisoire en faveur des trois détenus dans le cadre de l’affaire KBC, à savoir Mehdi Benaïssa, Ryad Hartouf et Nora Nedjaï. Si le tribunal de Sidi M’hamed accepte la demande des avocats de la défense et relâche ces trois détenus qui présentent toutes les garanties pour être présents au procès, cela veut dire que le pouvoir change de stratégie et abandonne le tout répressif. Et il n’y a pas que l’affaire KBC qui constitue une tache noire dans le bilan du pouvoir en place. La condamnation à cinq ans de prison ferme du général Hassan pour infraction à la réglementation a gravement terni l’image de l’Algérie en ce sens qu’on lui reprochait d’avoir mené une opération avec succès et récupéré de l’armement lourd qui aurait pu être utilisé par les groupes terroristes. Il y a également la condamnation de Djamel Kehal Medjoub, ex-chef de la sécurité présidentielle, à trois ans de prison ferme pour «négligence».
Mais le grand test pour le pouvoir en place réside dans le sort qu’il réservera à l’ex-ministre de l’Energie, Chakib Khelil, concerné par les scandales de Sonatrach 1 et 2. S’il y a quelqu’un qui devrait être jugé, et c’est l’avis partagé par de nombreux Algériens, c’est bien cet homme qui a d’ailleurs fait l’objet d’un mandat d’arrêt international en été 2013. Un mandat d’arrêt qui a été annulé non pas parce qu’il n’était plus concerné par ces scandales, mais parce qu’il n’y a eu vice de forme. Ainsi, Chakib Khelil serait-il convoqué par la justice et entendu sur ces affaires de corruption qui ont secoué Sonatrach durant la période où il était le premier responsable du secteur des hydrocarbures ? On le saura bientôt. Une chose est sûre : l’aggravation de la crise économique joue en défaveur de Chakib Khelil qui cherche à se refaire une virginité et à remonter les marches du pouvoir.
Sonia Baker
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