L’armée turque prend sa revanche sur l’islamiste Erdogan : vers une guerre civile ?
Bouleversement inattendu en Turquie où une tentative de coup d’Etat est en passe de renverser l’inamovible potentat Recep Tayyip Ergdogan. L’armée turque a déclaré dans un communiqué «avoir pris le pouvoir» pour le maintien de l’ordre démocratique et les droits de l’Homme». Elle précise que «toutes les relations internationales sont maintenues» et que «l’Etat de droit doit rester une priorité».
Contactée par Algeriepatriotique, une source locale affirme que les putschistes ont annoncé la prise du pouvoir au nom d’un conseil «Paix dans la nation», inspiré du slogan du père de la Turquie moderne, Atatürk, et que le président déchu se dirigeait ce soir vers l’aéroport d’Ankara, vraisemblablement pour prendre la fuite.
Les militaires qui ont pris cette initiative ont décrété, dans la soirée même, le couvre-feu alors que, selon notre source, les 80 millions de Turcs sont restés confinés chez eux. Les militaires disent vouloir restaurer l’Etat de droit contre un régime qui «a violé les principes constitutionnels et les libertés fondamentales». Traqué, Erdogan apparaît en public via son portable et veut donner l’impression qu’il est toujours l’homme fort du pays, en déclarant être l’«unique commandant». Dans son message, le président déchu appelle le peuple à braver le couvre-feu et à manifester contre les putschistes. Selon les échos qui nous sont parvenus, les partisans d’Erdogan sont sortis dans la rue par milliers aux cris d’«Allah Akbar». Une explosion a été entendue dans les locaux de la chaîne d’Etat TRT. Autre réaction politique, le Premier ministre a décrit des actions militaires «illégales» par un «groupe» au sein de l’armée.
Si aucun signe précurseur ne présageait une tournure aussi bouleversante à Ankara, on sait que les relations entre l’armée et le président Erdogan ont toujours été tendues, voire conflictuelles. La purge menée en 2009 contre une centaine d’officiers supérieurs de l’armée par un chef d’Etat imbu de son pouvoir et, surtout, de ses soutiens extérieurs, a provoqué une fracture qui s’est avérée irrémédiable. Les militaires ne lui ont jamais pardonné d’avoir humilié leur institution et d’avoir instauré un régime autocratique affilié aux Frères musulmans.
Les militaires ont certainement attendu le moment propice pour intervenir et mettre fin à cette aventure dans laquelle ce chef d’Etat mégalomane avait plongé le pays depuis son arrivée au pouvoir à la tête de son parti AKP. Son engagement zélé aux côtés de l’Otan, puis son implication plus que périlleuse dans le conflit syrien, où Erdogan a soutenu et encadré pendant quatre ans les milices armées qui sèment la destruction dans ce pays, ont achevé de le discréditer aux yeux de la hiérarchie militaire. Il est même allé jusqu’à engager une épreuve de bras de fer avec la Russie, en ordonnant d’abattre un avion de l’armée russe en novembre 2015, avant de présenter ses excuses il y a seulement deux semaines.
Politiquement affaibli par la série d’attentats ayant secoué les villes d’Istanbul et d’Ankara depuis quelques mois, et revendiqués par Daech, Erdogan ne savait plus comment justifier sa politique agressive qu’il continuait à mener au Moyen-Orient, ni comment retrouver son prestige après tant de déboires. Ce qui l’avait amené à accepter de normaliser ses relations avec Moscou et à envisager même de reconnaître la légitimité du Président syrien.
R. Mahmoudi
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