Les élucubrations dangereuses d’Al-Magharibia
Par Sonia-Linda S. – Il devient de plus en plus difficile de se mettre au diapason d’un média qui, depuis sa création, n’a de cesse de clamer, usant de tous les subterfuges, son indépendance. Une démarche incohérente de la chaîne de l’ex-FIS, qui de jour en jour confirme ses accointances avec l’aile radicale de l’ex-parti banni en Algérie, et ses pourvoyeurs de fonds, les pétromonarchies du Golfe, les théoriciens de la promotion et de la vulgarisation du salafisme et du wahhabisme, comme stratégie à adopter pour la conquête du pouvoir dans le monde arabe, au nom d’une grande religion, l’islam, qui est à l’antipode de la vision entretenue par les adeptes de l’extrémisme et du fondamentalisme. Cela dit, les derniers événements sur le plan international ont à juste titre permis de mieux cerner la démarche très ambiguë d’Al-Magharibia, qui a pour une fois choisi d’atténuer son acharnement contre l’Algérie, en consacrant tout son espace aux événements ayant ébranlé Nice, la ville balnéaire française, qui a été le théâtre d’une attaque terroriste d’une sauvagerie inégalable.
Jusqu’ici, tout est normal, il est effectivement légitime pour un média de bouleverser sa programmation, pour se consacrer exclusivement à un événement de grande ampleur. Mais pour les pseudo-journalistes et les faux analystes d’Al-Magharibia, les dizaines de personnes, dont plusieurs enfants, qui ont été massacrées par un dangereux terroriste sont un aspect sciemment relégué au second plan par la chaîne en question, qui s’est embarquée dans une diatribe stérile au sujet d’une déclaration du président français, François Hollande, dans laquelle il a évoqué un acte terroriste abject, perpétré par un terroriste islamiste. La chaîne a vite sauté sur l’occasion, en lançant une grande polémique pour entretenir la confusion autour de l’islam et de l’islamisme, alors que d’un point de vue rhétorique, ces deux concepts sont diamétralement opposés. L’islamisme, de l’avis même des docteurs de la foi, est tout simplement un mouvement radical qui mêle politique et religion, avec en toile de fond une instrumentalisation délibérée de la religion pour la conquête du pouvoir, par tous les moyens, y compris le recours à la violence dans sa version extrême.
En tout état de cause, la revendication de l’attentat de Nice par le groupe terroriste sanguinaire de l’Etat Islamique a vite jeté le discrédit sur les thèses d’Al-Magharibia, qui a tenté d’exploiter à fond une petite phrase relayée, il faut le dire, par l’ensemble des dirigeants de la planète, avec pour seul et unique objectif : semer le doute dans l’esprit des gens concernant l’islam et l’islamisme. Bien qu’une écrasante majorité de musulmans, de par le monde, arrive à faire le distinguo entre les deux concepts, pour préserver l’image d’une grande religion de paix, de tolérance et de savoir. Pis, un pseudo-journaliste de la chaîne de l’ex-FIS, connu pour son discours radical et ses prises de positions partisanes, a été très loin en balançant en direct sur l’antenne de fausses informations concernant des opérations de police dans certaines mosquées en France, une information vite démentie par son interlocuteur, un activiste dans le milieu associatif musulman, qui intervenait en direct à partir du territoire français.
Il est certain aujourd’hui que cette chaîne, qui commence à apparaître sous son vrai visage, ne cache plus sa proximité idéologique avec les grands mouvements proches du courant salafiste dans sa version la plus radicale, en affichant de surcroît son statut d’organe central d’un ex-parti politique algérien, d’obédience islamiste, à l’origine de la tragédie nationale dans les années 90. Un mouvement qui a déclenché une guerre tous azimuts contre toutes les composantes de la nation, pour accaparer du pouvoir, avec toutes les implications d’une telle éventualité sur le devenir de la nation algérienne, et l’avenir de toute la région et celui des peuples divers qui composent le puzzle appelé aujourd’hui l’Afrique du Nord, une région qui pouvait alors basculer à tout moment dans l’obscurantisme et le totalitarisme, sans la vigilance et le sens du devoir de ses enfants. L’autre élément qui a permis de confirmer les visées salafistes et apocalyptiques de ce média, c’est l’instrumentalisation, à un degré frôlant à certains égards le burlesque, des derniers événements en Turquie. La chaîne a tenté à travers ces incidents de faire revivre aux téléspectateurs l’expérience de l’ex-FIS en Algérie, en ouvrant son antenne exclusivement aux dirigeants de l’ex-parti banni, pour commenter, décrypter et analyser les développements de la situation sous un angle servant bien évidemment leur chapelle, en entretenant le mensonge et la tromperie, des aspects qui constituent désormais la substance même du fonctionnement de ce média. En tout cas, les Algériens ont définitivement tourné la page de cette période noire de leur histoire contemporaine, et pour les nostalgiques d’une république à la Erdogan en Algérie, la réalité politique et sociologique en Algérie n’a absolument rien de commun avec le paysage turc.
S.-L. S.
Londres
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