Libération de Benhadid, Benaïssa, Hartouf, Abbassi et Fekhar : le pouvoir lâche du lest
Le pouvoir semble vouloir adopter une attitude d’apaisement, après avoir fait preuve d’une démonstration de force qui a fait craindre le pire pour la démocratie. Il a soufflé comme un vent de panique en haut lieu. Les arrestations aussi brutales qu’injustifiées se sont multipliées ces derniers mois, pour des raisons souvent fallacieuses. Il en est ainsi du général Hocine Benhadid qui a passé près de dix mois derrière les barreaux sans être jugé et a été maintenu en détention durant toute cette période, malgré les alertes de ses avocats sur la dégradation de son état de santé et le danger qu’il encoure dans le cas où il n’était pas libéré. Aujourd’hui [lundi], ce sont les deux responsables de la chaîne de télévision d’El-Khabar, KBC, et la directrice au ministère de la Culture qui ont été relâchés après avoir écopé de peines avec sursis. Méritaient-ils la prison ? La question reste posée.
Nous apprenons de certaines sources, également, que l’activiste Kamel-Eddine Fekhar, qui a conduit les mouvements de protestation dans la vallée du M’zab, serait, lui aussi, sorti de prison, où il a passé une année, et aurait été placé sous contrôle judiciaire. Seul le général Hassan croupit encore dans une cellule, bien que son responsable hiérarchique ait informé la justice et, par-delà, l’opinion publique à travers une déclaration diffusée dans les médias, qu’il assumait l’entière responsabilité de la mission qui lui fut confiée et qu’il a remplie en ayant respecté les instructions de son chef à la lettre.
Il n’est pas exclu que l’ancien patron de la lutte antiterroriste soit libéré à son tour, d’autant que le pouvoir semble revenir à la raison après un épisode d’affolement dû à ce qu’il considère être des tentatives tous azimuts de remettre en cause la légitimité du locataire d’El-Mouradia. On ne sait pas, néanmoins, si ce changement de cap répond à une volonté du pouvoir de calmer le jeu ou si c’est une façon de montrer qu’il est le seul maître à bord et qu’il peut recourir à la privation de la liberté à sa guise et sans que personne puisse l’en empêcher.
Le recours abusif à l’incarcération sans procès, comme la remise en liberté des personnes incriminées sur décision politique, constitue une grave atteinte à la démocratie et discrédite sérieusement l’appareil judiciaire sur le socle duquel elle est bâtie. L’emprisonnement et la libération de ces citoyens «sur un coup de tête» doit alerter l’opinion publique, parce qu’elles traduisent une dangereuse dérive autoritaire.
Karim Bouali
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