Corruption : des commissions détournées sur des contrats de 10 milliards de dollars
Douze des dix-sept compagnies objet de l’enquête diligentée par les autorités italiennes et concernées dans des transactions s’élevant à 10 milliards de dollars ont été créées par le cabinet Mossack Fonseca, rapporte le Consortium international des journalistes d’investigation. Au centre de ce scandale, le nom de Farid Bedjaoui revient sans cesse. Ce dernier descendait dans un hôtel de luxe, le Bulgari Hotel, à Milan, dans le nord de l’Italie, où il a dépensé la bagatelle de 100 000 euros durant son séjour. Farid Bedjaoui vit actuellement au Beverly Hills Dubaï Inspired, aux Emirats arabes unis, rapporte le consortium, qui précise que ses avocats ont nié «toute implication de leur client dans un quelconque acte contraire à la loi».
Le consortium souligne qu’entre 2004 et 2013, l’Algérie, «qui détient la deuxième plus grande réserve de pétrole en Afrique», a perdu en moyenne 1,5 milliard de dollars par an à cause de l’évasion fiscale, de la corruption et du crime organisé. Selon le consortium, Farid Bedjaoui a profité de l’ouverture de l’exploitation de ses gisements de gaz aux firmes étrangères. La compagnie italienne Saipem a sauté sur cette occasion en or et raflé la mise en remportant sept contrats entre 2006 et 2009, devant les sociétés chinoises, françaises, britanniques, espagnoles et nipponnes.
Farid Bedjaoui, qui a décidé d’entrer de plain-pied dans les affaires liées au pétrole et au gaz, a recouru au cabinet panaméen Mossack Fonseca pour organiser un vaste réseau de corruption et d’enrichissement illicite. Les affaires se traitaient à bord de son yacht «de 43 mètres de long» ou dans les salons calfeutrés de l’hôtel milanais où il logeait. Selon les procureurs italiens, une société liée à Farid Bedjaoui, dénommée Collingdale Consultants Inc., a été utilisée pour «détourner 15 millions de dollars au profit des associés et de la famille Chakib Khelil». Ce dernier, joint par téléphone par le Consortium international des journalistes d’investigation, aurait refusé de faire une déclaration et aurait «raccroché» sans rien ajouter.
Le consortium rappelle que les autorités judiciaires françaises ont saisi l’appartement dont Farid Bedjaoui est propriétaire, situé dans une grande avenue parisienne, ainsi que son yacht, tandis que les autorités canadiennes ont bloqué ses actifs détenus à Montréal. De son côté, la justice américaine enquête sur trois biens immobiliers acquis par Farid Bedjaoui, dont la valeur globale s’élève à 50 millions de dollars. «L’investissement de l’argent de la corruption dans l’immobilier aux Etats-Unis est un modus operandi typique des délinquants économiques, à l’image de Farid Bedjaoui», a écrit le procureur de Milan en charge du dossier dans une lettre adressée aux autorités américaines en mars 2015, selon le consortium.
Farid Bedjaoui continue de faire parler de lui dans un des plus grands scandales impliquant les géants pétroliers italien et algérien, sans qu’il soit inquiété à ce jour. Il continue de couler des jours paisibles dans son quartier huppé de Dubaï. Jusqu’à quand ?
Lina S.
Comment (196)