L’assassinat d’un prêtre en France ravive le triste souvenir de l’exécution des moines de Tibhirine par le GIA
Le crime abject qui a coûté la vie dans des conditions atroces au prêtre d’une église de Rouen, dans le nord de la France, rappelle l’exécution tout aussi abominable des sept moines de Tibhirine, en 1996, en Algérie. Ce nouveau pas dans l’horreur franchi par les hordes sauvages, au cœur même d’un lieu de culte, augure d’une escalade et d’une diversification aussi bien des cibles que des moyens utilisés par les terroristes islamistes pour semer la terreur et, ainsi, répandre la panique dans toute l’Europe et dans tous les segments de la société. C’est exactement à ce même objectif que répondaient les massacres commis par les groupes islamistes armés en Algérie durant la décennie rouge.
L’enlèvement puis l’exécution lâche des sept moines trappistes de Tibhirine, dans la wilaya de Médéa, par les éléments de Djamel Zitouni, avait un but bien précis. Le chef terroriste voulait négocier avec les autorités françaises une sorte de deal pour court-circuiter toute coopération entre Alger et Paris dans le domaine de la lutte antiterroriste. Un cafouillage au sommet de l’Etat français avait fait voler en éclats le début d’accord entre les terroristes et les tireurs de ficelles à Paris, et la vie de sept religieux fut ainsi sacrifiée sur l’autel des calculs morbides des décideurs politiques. Le France venait de changer de cap après les attentats du métro Saint-Michel. Le ministre de l’Intérieur de l’époque, Charles Pasqua, avait décidé de frapper d’une main de fer les réseaux dormants qui avaient pu proliférer en France grâce au laxisme des autorités françaises à l’égard des «réfugiés islamistes fuyant une junte militaire au pouvoir à Alger». Vingt ans plus tard, on se retrouve pratiquement dans le même cas de figure. L’attaque commise par un Syrien en Allemagne et le meurtre du prêtre en France, ce matin, participent du même cheminement qui avait permis, dans les années 1990, aux activistes du FIS de s’installer dans plusieurs capitales occidentales où ils furent tous – sans exception – approchés par les services secrets des pays d’accueil dans le cadre d’un «échange de bons procédés». C’est ainsi qu’on retrouvera Anouar Haddam aux Etats-Unis, Rabah Kébir en Allemagne, Mourad D’hina en Suisse, etc. Ces mêmes extrémistes religieux qui ont voulu imposer un Etat théocratique par l’intimidation, la manipulation et, enfin, la violence par le biais des nombreux groupes islamistes armés qui ont fini par être décimés les uns après les autres continuent d’être hébergés dans les pays occidentaux qui subissent, désormais de plein fouet, les contrecoups de la politique de terreur que ces hôtes – encombrants ou utiles ? – ont instaurée en Algérie pendant dix longues années et qui visait à remplacer le régime républicain par un califat moyenâgeux.
Observateurs, experts et analystes s’accordent à dire que les mesures envisagées par les gouvernements dans les pays touchés par des attentats ces derniers mois ne seront efficaces que si elles sont appliquées à la lettre et que si la classe politique place la sécurité des citoyens au-dessus des calculs électoralistes et des intérêts politiciens étroits. Les services de sécurité occidentaux devront faire preuve d’une fermeté sans faille face à la menace terroriste qui, si elle n’est pas jugulée en Europe, s’étendra à nouveau vers le sud de la Méditerranée où l’Algérie – et à un degré moindre le Maroc – représente le dernier bastion capable de faire face à Daech, vu l’«expérience irremplaçable» de son armée et de ses services de sécurité, comme l’affirmait récemment l’ambassadeur de France à Alger, Bernard Emié.
Aujourd’hui, c’est en Europe que le terrorisme islamiste doit être combattu. Car c’est là-bas qu’il a ses racines. Les groupes armés qui sévissent en Syrie, en Irak, en Libye, au Mali, au Nigeria et ailleurs ne sont plus des groupuscules terroristes épars, mais des unités paramilitaires dont l’élimination se fera dans le cadre d’une guerre classique.
M. Aït Amara
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