Nouioua : «L’Etat doit changer de cap pour éviter la catastrophe»
L’ancien gouverneur de la Banque d’Algérie, Badreddine Nouioua, prévient quant à la poursuite de la dégradation de la situation financière du pays. Dans un entretien accordé au quotidien arabophone El-Khabar, cet expert financier a qualifié la situation actuelle de «menaçante» pour les grands équilibres macroéconomiques du pays. «Si la situation ne change pas, le pays ira droit vers une catastrophe économique», prévient l’ancien gouverneur de la Banque d’Algérie, d’habitude moins alarmiste.
Se basant sur les grands agrégats économiques disponibles, recettes en devises, dépenses globales, déficit commercial et de la balance des paiements, réserves de change, etc., ce spécialiste de la finance voit en l’Algérie un pays «qui court à sa perte». Au rythme des dépenses actuelles et des importations qui restent trop élevées en dépit de mesures restrictive appliquées sur certains produits, les réserves de change, selon M. Nouioua, s’établiraient d’ici la fin de l’année à 120 milliards de dollars. Et si rien n’est fait pour relancer sérieusement la production nationale, réduire les importations et diversifier en même temps les exportations, ces réserves «ne tiendront pas plus de trois ans», selon lui.
Badreddine Nouioua appelle un sursaut patriotique et à une prise de conscience sur la nécessité d’encourager l’investissement privé et à lever la moindre embûche qui pourrait retarder la concrétisation de projets structurants et à forte valeur ajoutée. Selon lui, l’Algérie a besoin de toutes ses forces «économiques» pour pouvoir dépasser cette situation sans trop de grabuge. L’ancien gouvernement de la Banque d’Algérie estime qu’il est plus que jamais nécessaire de «libérer l’acte d’investir» et de laisser les opérateurs économiques travailler afin d’améliorer la production nationale et d’aller vers l’exportation et réduire la dépendance outrancière de l’Algérie des hydrocarbures. Il affirme que les placements en devises de l’Algérie, bien que sûrs, vont continuer à générer des bénéfices très faibles en raison notamment de la persistance de la crise économique en Europe et aux Etats-Unis où les banques centrales maintiennent des taux directeurs très faibles pour stimuler l’investissement générateur de croissance et d’emplois.
Répondant à une question sur la nature des placements en devises de l’Algérie, Badreddine Nouioua assure qu’ils ne dépendent pas de la seule volonté de la Banque d’Algérie. Il s’agit d’un choix stratégique de l’Etat algérien. D’autres possibilités de placements sous forme d’actions ou d’obligations existent, souligne-t-il. Mais ce sont des choix qui doivent être mûrement réfléchis en raison notamment des risques qu’ils présentent, fait-il remarquer, insistant sur l’urgence pour le gouvernement de changer de cap et de politique afin d’éviter une catastrophe en Algérie.
Sonia Baker
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