Et si on commençait par l’homme !
Par Samir Arnaoui – Une flopée d’articles est quotidiennement consacrée à la question cruciale du devenir de l’Algérie sans les hydrocarbures et la fonte de ses réserves de change. Avant d’entamer ce sujet, je voudrai d’abord, très simplement, rappeler que l’Etat, ce sont des citoyens qui le font, le construisent (ou le reconstruisent). Un Etat est fait par des hommes et des femmes, en charge des affaires de la cité : tous ceux qui sont investis de la plus petite à la plus grande responsabilité, en contrepartie de laquelle ils sont d’ailleurs payés, sont des maillons de l’immense chaîne qui constitue l’Etat.
Mais pour être plus précis, cette construction ne pourra se faire sans de la vaillance, de l’organisation et de la persévérance. Il n’y a qu’à voir les fourmis et les abeilles, qui font des miracles grâce à leur patience, leur organisation et leur sacralisation du travail qui ne finiront jamais d’étonner. Nous devrions nous en inspirer. Il y a quelques mois, les options endettement ou pas endettement extérieur faisait débattre dans la presse les contre et les pour. Idem pour la rente pétrolière. Pour ma part, je suis de ceux qui pensent que la rente pétrolière et son très aisé substitut qu’est l’endettement extérieur sont nos deux malédictions, et je soutiens que la seule option pour nous en sortir est un retour à la valeur travail, en extrayant non plus de l’or noir, mais l’or vert qui se cache sous nos terres, de nos propres mains.
La solution me semble être dans ce triptyque idéal : pas de rente, pas d’endettement extérieur et pas d’homme qu’il ne faut pas à la place qu’il faut. Pour ce dernier point, un ami aime à rappeler qu’il y a quelques années, une éminente entité centrale publique recrutait à des postes de responsabilité en se basant exclusivement sur l’expérience acquise et avérée du candidat, de ses diplômes et du projet qu’il comptait réaliser s’il était retenu pour le poste. Le candidat jaugé et jugé par un jury externe (ou siégeaient aussi des psychologues), totalement neutre, c’est-à-dire sans accointances avec quelque élément interne à l’entreprise, devait convaincre, à l’écrit et à l’oral, de ses capacités managériales et humaines et de ses aptitudes à rassembler un collectif pour mener à bien sa mission.
Le jury classait donc les prétendants, abstraction faite de leur région, tribu, couleur de peau et croyances. Nous avions donc eu de très bons gestionnaires grâce à cette méthode infaillible. Mais cette entreprise a, un jour, décidé de se passer de cette règle, et plus rien ne fut comme avant. Les nommés furent de purs produits de la cooptation, et l’indigence caractérisa la gestion de toutes les sous-entités qui se paupérisèrent avant d’entrer dans une longue agonie. Maintenant que le vocabulaire s’est enrichi de mots comme gouvernance, stratégie, rigueur et rentabilité, je rêve que l’entité centrale en question revienne à sa règle d’or, afin que l’on débusque les opportunistes, les faux diplômés, les cancres bonimenteurs qui confondent la tchatche et le savoir, et les diables drapés dans des habits de moine.
Enfin, vous avez entendu, comme moi, des centaines de cadres en poste ou à la retraite crier sur tous les toits qu’il fallait revoir notre stratégie de développement, mais comme moi, vous constatez que rien ne change ou presque rien… Alors, de grâce, changez les hommes, mais prenez les bons, et des Algériens, des vrais, car il y en a, ici ou ailleurs, et revenons à cette bonne vieille méthode du jury indépendant pour la sélection de nos managers, du pauvre chauffeur qui doit faire ses preuves, en conduisant sans faute et sans faille, avant d’être recruté, au PDG, voire au ministre. Urgence signalée, car la cooptation enlise chaque jour un peu plus le pays dans la mouise.
S. A.
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