Le Conseil d’Etat français suspend un arrêté anti-burkini
La décision était attendue. Le Conseil d’État français, saisi par la Ligue des Droits de l’Homme et le Collectif contre l’islamophobie, a suspendu l’arrêté municipal pris à Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes) portant sur l’interdiction d’accéder aux plages de la commune «à toute personne n’ayant pas une tenue correcte». L’arrêté visait notamment le port du burkini.
Selon le Conseil d’État, les maires ne peuvent restreindre «les libertés qu’en cas de «risques avérés» pour l’ordre public». L’institution a considéré qu’à Villeneuve-Loubet, aucun élément ne permet de retenir un risque de trouble à l’ordre public.
L’ordonnance du Conseil d’Etat précise que «l’arrêté litigieux a ainsi porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle. »
La Ligue des droits de l’homme avait fait appel après une décision du tribunal administratif de Nice. Ce dernier avait validé lundi l’interdiction de ces tenues de bain en estimant que cette interdiction, prononcée aussi par plusieurs communes de la Côte d’Azur, était «nécessaire, adaptée et proportionnée» pour éviter des troubles à l’ordre public.
Amnesty International dénonce l’interdiction du burkini en France
Amnesty International exhorte la justice française à annuler l’interdiction du burkini, qualifiant cette interdiction d’«atteinte aux libertés d’expression et de religion des femmes et à leur droit de ne pas subir une discrimination», a déclaré l’ONG dans une déclaration parvenue à notre rédaction.
«Cette requête examinée le 25 août offre à la justice française l’occasion d’annuler une interdiction discriminatoire qui se fonde sur, et qui nourrit, des préjugés et l’intolérance», a déclaré John Dalhuisen, directeur du programme Europe d’Amnesty International. Et d’ajouter : «Les autorités françaises doivent cesser de prétexter que ces mesures sont destinées à protéger les droits de femmes. En réalité, ce type de mesures discriminatoires et invasives restreint les choix des femmes, viole leurs droits et conduit à des violences.»
Sur sa lancée, l’ONG estime que les arguments avancés pour justifier l’adoption de ces interdictions «sont tous basés sur des stéréotypes négatifs attachés à une minorité déjà stigmatisée» car ces interdictions «ne contribuent en rien, selon la déclaration, à renforcer la sécurité publique mais font beaucoup pour favoriser une humiliation publique». «Elles sont non seulement en soi discriminatoires mais, comme nous l’avons vu, leur application entraîne aussi des violences et un traitement dégradant pour les femmes et les filles musulmanes», a déclaré John Dalhuisen.
«Si les autorités françaises étaient réellement déterminées à protéger la liberté d’expression et les droits des femmes, ces interdictions abusives seraient immédiatement et inconditionnellement suspendues», conclut la déclaration.
Nous apprenons, enfin, que le Conseil d’Etat réuni aujourd’hui vendredi a suspendu l’arrêté «anti-burkini» pris par la municipalité de Villeneuve-Loubet.
De nombreux arrêtés locaux avaient interdit le port de toute tenue de bain contraire à l’hygiène et au principe de «laïcité». Certains de ces arrêtés précisent également que, compte tenu de la menace terroriste actuelle, le port de tenues spécifiques manifestant des croyances religieuses pourrait porter atteinte à l’ordre public.
R. Mahmoudi et agence
Comment (14)