Un monument sur la guerre d’Algérie crée la polémique dans une ville française
A Chalon-sur-Saône, une ville située dans le centre-est de la France, un projet de monument pour honorer la mémoire des «morts pour la France» en Afrique du Nord, qui devrait voir le jour dans cette ville probablement à la fin de cette année, sur la place du 19-Mars-1962, crée la polémique. Les promoteurs de ce projet ne sont pas sûrs de pouvoir le réaliser à l’échéance qu’ils prévoient à cause de la question du financement, mais ils risquent surtout d’être gênés par les oppositions d’un collectif d’associations, créé spécialement contre l’implantation du monument considéré comme une «abdication supplémentaire face à nos ennemis, puisque le 19 mars 1962 représente la fête de la victoire des «terroristes» algériens, aidés par les communistes». Ces associations, qui se distinguent, par ailleurs, par leur racisme exprimé en ce moment dans l’islamophobie, n’ont toujours pas digéré l’indépendance de l’Algérie reconquise au prix de très lourds sacrifices grâce à la lutte menée par les Algériens, dont les héros sont encore présentés comme des «terroristes», tels qu’ils étaient qualifiés à l’époque par la presse colonialiste française.
Les opposants à ce projet n’hésitent pas à faire dans l’amalgame le plus abject en écrivant : «Il est déplorable de constater qu’en ces temps de guerre, comme tout le monde s’accorde à le dire, alors que notre pays subit des actes de barbarie sans nom, certains continuent à vouloir faire la part belle aux terroristes. Car ceux que nous connaissons aujourd’hui sont les mêmes qui ont pratiqué des actes inqualifiables après le 19 mars 1962». Dans le contexte actuel, ils insistent sur le terme «terroriste» pour confondre entre les patriotes algériens qui ont combattu avec les armes l’occupant colonial français et ont permis à notre pays de recouvrer sa souveraineté, et les criminels recrutés dans les banlieues en France et envoyés faire le «djihad» en Syrie. Ces mêmes «combattants» qui retournent frapper cruellement leur pays d’origine, comme ils l’ont fait à Paris en janvier et novembre 2015 et à Nice en juillet dernier, tout en déstabilisant la population par la menace réelle qu’ils font planer sur elle.
Ce qui devrait se limiter à être un débat franco-français prend un contenu provocateur qui veut toucher notre pays. C’est le même scénario qui se reproduit à chaque fois qu’une commémoration de la guerre coloniale menée par la France pour conserver sous sa domination l’Algérie, comporte incidemment une forme d’hommage indirect au combat de notre peuple. La dernière fois, c’était à l’occasion du 19 mars. Ceux qui n’ont pas digéré l’indépendance de l’Algérie après 132 ans d’occupation coloniale, ont enragé en apprenant que cette date est célébrée par les Algériens comme le «Jour de la Victoire». L’action criminelle de l’OAS (Organisation de l’armée secrète) qui a continué, après le cessez-le-feu, à faire des victimes dans la population algérienne et chez les Européens suspectés de sympathie avec notre cause, n’a rien changé au cours des événements et n’a pas empêché le retour de la souveraineté nationale dans notre pays.
Les nombreux amis français que compte l’Algérie en France donnent à cette date sa vraie signification ; celle de la fin du colonialisme incompatible avec les valeurs de la République. C’est certainement dans ce sens que le président François Hollande a décidé de commémorer, pour la première fois, le 19 Mars 1962, n’ignorant pas qu’il est considéré par le peuple algérien comme le «Jour de la Victoire», et suscitant, pour cette raison, une levée de boucliers au sein des associations de harkis, pieds-noirs et de politiques de droite. La même polémique renaît à Chalon-sur-Saône.
Houari Achouri
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