La décision de débaptisation de la rue Fernand-Iveton à Oran annulée
Nous apprenons de sources concordantes que l’APC d’Oran a décidé de surseoir à sa décision annoncée préalablement de débaptiser une rue, au quartier Ederb, portant le nom de l’illustre martyr de l’indépendance algérienne Fernand Iveton, ainsi qu’une autre rue baptisée au nom de l’imam El-Houari. C’est certainement le résultat de la mobilisation citoyenne qui n’a pas cessé depuis l’annonce de la nouvelle qui a indigné beaucoup de patriotes et de compagnons de ce valeureux combattant de la liberté que fut Fernand Iveton. Une pétition avait été lancée au cours de la semaine par des citoyens dénonçant cette honteuse débaptisation. S’adressant au ministre des Moudjahidine, les signataires exigeaient que le nom de Fernand Iveton, «mort comme ses frères au combat», soit réhabilité et remis en lieu et place sur les murs de la rue qui portait son nom. Dans le texte de la pétition, les pétitionnaires ont dénoncé une «une décision grave» pour une multitude de raisons, estimant que la débaptisation porterait atteinte à «la crédibilité» et à «l’honneur des institutions». Une telle décision serait également «grave» pour «la mémoire de ceux et celles qui ont donné leur vie et leur jeunesse pour l’Algérie, quels que soient leur origine, leur religion ou leur sexe».
Né le 12 juin 1926 au Clos Salembier, à Alger, et guillotiné le 11 février 1957, Fernand Iveton était un militant communiste français et anticolonialiste rallié au FLN. Auteur d’une tentative d’attentat contre l’armée coloniale, il était le seul Européen guillotiné de la guerre de Libération nationale. Fernand Iveton était descendant d’immigrés européens. «C’était un pied noir typique», dira de lui son avocat parisien, Joë Nordmann, dans son livre Aux vents de l’histoire, paru en 1996. Mais «celui-là n’est pas comme les autres», avait dit, un jour, Didouche Mourad à son ami Ahmed Akkache. «S’il y en avait beaucoup comme lui, cela aurait changé bien des choses».
Fernand Iveton faisait partie de cette élite ouvrière européenne qui a pu s’affranchir de la mentalité colonialiste. «Il avait très tôt assimilé cette notion d’indépendance, à l’image d’autres Européens militants du PCA, comme Henri Maillot, Maurice Laban, Maurice Audin et d’autres. A ses yeux, la seule issue pour les Européens était de se détacher du système colonial», témoigne l’auteur de La Question, Henri Alleg. Fidèle à son engagement, Fernand Iveton s’engagea dans la lutte armée avec la création, en juin 1955, des Combattants de la libération – la branche armée du PCA. Il choisit, ensuite, d’intégrer Le FLN/ALN, et devient membre du groupe d’action du Champ de Manœuvres dirigé par le militant et syndicaliste M’hamed Hachelaf.
Dans un témoignage, Jacqueline Guerroudj, autre militante nationaliste issue de la communauté européenne, et rescapée de la guillotine, décrit le rôle éminent qu’a joué de Fernand Iveton dans la guérilla : «L’objectif des fedayin, clairement exprimé, était, selon l’idée émise par Fernand Iveton qui connaissait bien les lieux à l’usine à gaz du Hamma où il travaillait, de placer des bombes sous les tuyaux à un endroit choisi pour que les dégâts empêchent l’usine de fonctionner, privant ainsi Alger d’électricité», rapporte l’historien Mohamed Rebah, dans une contribution parue dans Algeriepatriotique.
Les responsables de la commune d’Oran qui avaient pris, consciemment ou inconsciemment, cette décision d’effacer le nom de ce martyr, ont-ils jamais lu le parcours de ce héros de notre glorieuse Révolution ?
R. Mahmoudi
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