Les caisses des Al-Saoud se vident : des employés réclament leurs salaires impayés
Du rarement vu : le personnel d’un hôpital en Arabie Saoudite a passé les fêtes de l’Aïd sans être payé. Plus de 100 membres du personnel – médecins et infirmiers – de l’hôpital privé ont organisé hier (lundi) un rassemblement pour protester contre le non-paiement des salaires depuis trois mois et demi. En fait, il s’agit d’une grève comme l’a expliqué une infirmière de cet hôpital. Ce débrayage constitue un fait rarissime, le doit de grève n’étant pas reconnu en Arabie Saoudite. Elle est appelée à être reconduite si les revendications du personnel de l’hôpital ne sont pas satisfaites. C’est la plus récente des manifestations provoquées par une série de déboires financiers qui frappent les entreprises dans le royaume. Le régime wahhabite allié des Etats-Unis traverse une situation de difficultés financières qui compromet la logique de la paix sociale qui a permis au pouvoir de mettre en œuvre une politique qui lui a assuré la survie jusqu’à maintenant. Un baril de pétrole qui tourne autour de 40 dollars, prive l’Arabie Saoudite, au train de vie ahurissant, des moyens de maintenir une telle démarche appuyée sur un niveau de dépenses très élevé.
La tendance qui s’est inversée peut entraîner un mouvement de contestation sociale comme on en voit très rarement en Arabie Saoudite. Les grandes entreprises saoudiennes, en particulier celles qui sont dans la construction, font face à de graves crises financières qui se traduisent par l’impossibilité pour elles de payer les salaires de dizaines de milliers d’employés. Cette situation d’étranglement financier est due au retard mis par le gouvernement à rembourser les entreprises à cause de la baisse des recettes publiques entraînée par l’effondrement des prix du pétrole depuis l’été 2014.
Pour la première fois, l’Arabie Saoudite est confrontée à des problèmes de trésorerie qui contraignent le régime à reporter certains paiements. La crise financière vécue par l’Arabie Saoudite se répercute sur les dizaines de milliers de travailleurs étrangers, ainsi que sur ceux qui ont des difficultés à quitter le royaume, ou changer d’emploi. En août, le roi Salman a exigé de l’administration saoudienne qu’elle facilite les procédures de retour des travailleurs étrangers vers leur pays, en prenant en charge le coût de leur billet d’avion et en accélérant l’octroi de visas de sortie. Il demande également de leur fournir une aide alimentaire.
Dans le même temps, l’Arabie Saoudite dirige depuis dix-huit mois une coalition arabe engagée dans une guerre très coûteuse contre le Yémen. Certains observateurs voient dans cette guerre une opération des Al-Saoud pour détourner l’attention de la population des problèmes intérieurs créés par la crise financière que traverse le pays. Tout indique que la famille Al-Saoud a abandonné sa politique de l’Etat-providence et que la population qui subit les conséquences de la rigueur imposée par le déficit budgétaire consécutif à la chute des recettes extérieures, entraînée par la baisse des prix du pétrole, peut bouger et menacer les fondements de cette dynastie.
Houari Achouri
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