Zohra Bitat-Drif : «Les Français insultent notre révolution et l’Etat ne fait rien»
La moudjahida Zohra Bitat-Drif a réagi avec véhémence aux propos du président de l’Association française de victimes du terrorisme (AFVT), Guillaume Denoix de Saint Marc, et s’en est pris violemment à l’Etat algérien pour sa passivité face à une telle insulte à la révolution algérienne. Pour cause. Les faits remontent au 19 septembre, place des Invalides à Paris, où était organisée une cérémonie en hommage aux victimes du terrorisme par l’AFVT, durant laquelle son président a assimilé les actions des moudjahidine pendant la guerre de Libération nationale à des actes terroristes, citant Zohra Bitat-Drif et Djamila Bouhired, en rappelant l’attentat du Milk-Bar du 30 septembre 1956. Ce discours a été prononcé en présence du président français et de membres de son gouvernement. Pourquoi avoir réagi une semaine après les faits ? Mme Zohra Bitat-Drif a répondu que c’est «parce que j’ai attendu la réaction de l’Etat algérien, du gouvernement algérien et du ministre des Moudjahidine». Et de renchérir : «Vous aurez remarqué, comme moi, qu’ils brillent par leur absence.»
Pour Mme Zohra Drif, la Constitution est claire à ce sujet. «L’Etat et le gouvernement sont responsables de la défense et de la protection de tout l’héritage de notre glorieuse guerre de Libération nationale, de ses acteurs et de ses symboles.» «Je n’attends pas un banal exercice de communication. J’attends de mon Etat, de mon gouvernement et de mon ministre de tutelle qu’ils assument leurs responsabilités constitutionnelles», a-t-elle exigé. La moudjahida n’a pas épargné l’Organisation nationale des moudjahidine dont les statuts «visent clairement la défense des intérêts moraux des moudjahidine», avouant qu’elle attendait «surtout» la réaction du FLN qui prétend, selon elle, continuer le combat mené par le FLN historique. «Mais à l’évidence, la direction actuelle du FLN a complètement rompu et divorcé avec ce pourquoi le FLN avait été créé : l’indépendance nationale», a-t-elle déploré. «Nous n’avons jamais été humiliés de la sorte.»
Mme Zohra Bitat-Drif, pour qui le fait de citer l’attentat du Milk-Bar – qu’elle revendique d’ailleurs pleinement –, action menée dans le cadre de la glorieuse guerre de Libération contre la France coloniale, dans la liste des attentats terroristes «revient à assimiler la lutte de libération à un mouvement de terreur, illégitime, injuste et condamnable (…) Assimiler un mouvement de résistance libérateur à un mouvement de terreur totalitaire, c’est-à-dire assimiler Ben M’hidi à Massu, donc Jean Moulin à Hitler». Mme Zohra Bitat-Drif est catégorique : «Cette assimilation est moralement infamante, dégradante, car au-delà de ma personne, tous les moudjahidine sont offensés et salis. C’est une grave attaque contre notre Etat national et qui remet en cause le droit de notre peuple d’user de tous les moyens pour se libérer du joug colonial».
La moudjahida a tenu à rappeler au pouvoir français et à ses organisations satellites, puisqu’ils semblent oublier, que l’Algérie est l’un des premiers pays «à subir les affres du terrorismes islamistes». Revenant sur la décennie noire, elle dénonce les pays occidentaux, dont la France, qui nous ont isolé sur la scène internationale et nous ont refusé le droit «de résister à l’hydre islamiste». Elle a pointé du doigt leur campagne criminelle du «qui tue qui» qui visait, selon elle, «à absoudre les terroristes islamistes de leurs crimes, revendiqués pourtant haut et fort, et accabler notre Etat et notre armée nationale et tous ceux qui résistaient», les accusant de vouloir, à travers cette campagne, «abattre notre Etat républicain et de promouvoir le projet théocratique qu’ils se targuent aujourd’hui, de vouloir combattre». «Pour ma part, je doute très fortement que les promoteurs de Daech et autres GIA deviennent subitement leurs ennemis.»
Concernant le Groupe des 14, Mme Zohra Bitat-Drif a fait savoir que rien n’a été décidé pour le moment. «Nous sommes toujours en concertation. Il y a une volonté réelle d’aller jusqu’au bout», a-t-elle conclu.
Houneïda Acil
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