La première plainte contre le régime saoudien sera déposée aux Etats-Unis ce lundi : 750 milliards de dollars en jeu
L’entrée en vigueur de la loi autorisant les victimes des attentats du 11 septembre à poursuivre en justice l’Arabie Saoudite qui n’a pas été approuvée par le président Barack Obama, mais a été finalement imposée par les élus du Congrès américain, va être «inaugurée» par une des victimes concernées qui va déposer la première plainte ce lundi et va demander le gel des avoirs saoudiens aux Etats-Unis. Il y a quelques mois, alors que la crise entre les deux pays n’en était qu’à ses débuts, le département du Trésor américain avait révélé que 116,8 milliards de dollars appartenant à l’Arabie Saoudite étaient injectés dans l’économie des Etats-Unis. L’Arabie Saoudite était prévenue : dès qu’ils ont su que les 28 pages classifiées du rapport officiel sur le 11 septembre étaient «accablantes» pour le régime saoudien et que la perspective d’être traîné devant les tribunaux américains pour avoir financé Al-Qaïda devenait inévitable, les monarques qui règnent à Riyad avaient menacé de retirer en représailles leurs actifs aux Etats-Unis, évalués à 750 milliards de dollars.
Les Al-Saoud ont grandement besoin de cet argent pour faire face aux difficultés économiques sans précédent provoquées par la chute vertigineuse des prix du pétrole depuis 2014. Une crise aggravée par l’intervention armée dans les guerres de déstabilisation menées par groupes terroristes mercenaires interposés en Syrie, et directement contre le Yémen, en dirigeant une coalition de pays arabes soutenue par les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni, au prix de lourdes ponctions dans les caisses du royaume saoudien.
Mais, maintenant, ce que la famille des Al-Saoud devra se résoudre à envisager, c’est plutôt qu’un juge ordonne le gel des avoirs saoudiens à titre conservatoire. C’est une pratique juridique courante aux Etats-Unis. Pour rappel, la première riposte de l’administration américaine aux attentats de New York et Washington du 11 septembre 2001, a été, à peine quelques jours après, le décret présidentiel du 24 septembre, par lequel Georges W. Bush avait ordonné le gel des avoirs financiers de vingt-sept individus et organisations présumés «terroristes». Mais l’objectif, alors, était de priver les terroristes de leurs fonds qui servent à leurs activités criminelles.
Le gel contre les avoirs détenus par les financeurs ou les acteurs du terrorisme fait partie du dispositif de lutte antiterroriste adopté par de nombreux pays confrontés à cette menace. Il permet de geler les avoirs d’une personne qui «commet ou tente de commettre des actes de terrorisme, y participe ou les facilite, ainsi que ceux qui les financent». Récemment, le gouvernement belge a gelé les avoirs de dix personnes soupçonnées d’être en lien avec des activités terroristes, et plus précisément avec les attentats de Bruxelles et de Paris. La Belgique a mis en application un arrêté royal sur la lutte contre le financement du terrorisme, datant de 2006. Tous les fonds et ressources économiques de ces dix personnes sont gelés et il est interdit de leur prêter de l’argent.
C’est ce qui risque d’arriver aux Al-Saoud qui n’ont pas pu bloquer ce processus comme ils l’avaient fait en juin dernier, en faisant pression pour imposer à l’ONU de retirer l’Arabie Saoudite de la liste noire des pays violant les droits des enfants. La coalition arabe menée par l’Arabie Saoudite avait été placée sur la liste noire des pays violant les droits des enfants, pour avoir provoqué la mort de centaines d’enfants des suites de leurs frappes aériennes contre le Yémen. Des diplomates à l’ONU avaient fait savoir que l’Arabie Saoudite avait menacé de couper des financements à l’Office des Nations unies qui aide les réfugiés.
Houari Achouri
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