Mémorandum de l’opposition : «La sécurité nationale est menacée»
A l’issue de leur réunion à Alger, les partis de l’opposition regroupés dans l’Instance de coordination et de suivi de l’opposition (Icso) ont rendu public un mémorandum intitulé «Le recul des acquis démocratiques en Algérie». Dans ce document, les signataires ont, d’entrée, mis l’accent sur «la vacance du pouvoir» qui est venue se greffer à «la confiscation de la volonté populaire depuis le recouvrement de la souveraineté nationale». Ils estiment que «cette situation a permis la multiplication des centres de décision sous contrôle de forces extraconstitutionnelles, au point où il est devenu légitime de se poser la question de savoir qui dirige le pays». Poursuivant sur la même lancée, les rédacteurs du texte jugent que «l’exacerbation des tensions entre ces forces extraconstitutionnelles constitue une menace à la sécurité nationale». Et d’enchaîner : «L’équation est davantage compliquée par l’intrusion de l’argent douteux dans la sphère politique» à laquelle s’ajoute une crise financière «aiguë» qui a pour origine l’échec économique et social, «mis à nu par la dépréciation des cours du pétrole», lit-on encore dans le document.
Dans leur jugement implacable, les signataires constatent que «face à l’impasse politique, institutionnelle et économique, soucieux de neutraliser les voix citoyennes qui s’élèvent remettant en cause sa légitimité, son bilan catastrophique et son absence de vision pour le futur de la nation, le régime en place a choisi la fuite en avant». L’opposition accuse le pouvoir de «s’engager dans une opération à large échelle d’atteintes aux droits fondamentaux, de restriction des libertés citoyennes et de dénaturation du pluralisme politique en prévision, notamment, des prochaines échéances électorales».
Dans le chapitre des libertés, l’Icso pointe l’accentuation de la répression et de «graves dénis» concernant la liberté d’expression et d’opinion. «Des condamnations à de lourdes peines de prison ferme sont fréquemment prononcées sur la base de poursuites injustifiées pour diffamation et outrage au chef de l’Etat à l’encontre d’activistes sur les réseaux sociaux», note cette instance. «L’acharnement du pouvoir ne se limite pas seulement au monde de la culture et de la presse, il s’étend aux défenseurs des droits de l’Homme et aux militants de partis politiques, aux syndicalistes et aux officiers supérieurs de l’ANP à la retraite», ajoute-t-elle.
Les rédacteurs du document évoquent, par ailleurs, «une instrumentalisation de la justice» par le pouvoir exécutif et une volonté de remettre en cause le pluralisme politique. Ils accusent le pouvoir d’organiser «l’achat des consciences à coup d’avantages indus et clientélisation de franges entières de la société», et aussi de «d’ingérence» dans la vie organique des partis politiques. Dans la même optique, l’Icso considère que le nouveau régime électoral «fait subir au pluralisme politique une profonde régression» et «reconduit le système de la fraude en le perfectionnant pour assurer le détournement de la volonté populaire». Pour cette instance, le nouveau code électoral «empêche l’avènement d’institutions légitimes et représentatives que suppose la constitution d’un Etat de droit».
En guise de conclusion, les partis de l’opposition mettent en garde contre un pouvoir qui, selon eux, constitue «une menace pour le pays». «Le pouvoir, qui reste malheureusement sourd aux appels de l’opposition au dialogue pour une sortie de crise politique et pacifique, porte l’entière responsabilité de la situation actuelle et des éventuels dérapages qui pourraient en résulter», avertissent-ils.
R. Mahmoudi
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