Boutarfa dévoile les dessous de l’accord de l’Opep à Alger
Le ministre de l’Energie, Noureddine Boutarfa, est revenu sur l’accord historique des pays de l’Opep arraché à Alger le 28 septembre dernier. Dans deux entretiens distincts à des médias arabophones, le ministre de l’Energie explique comment l’Algérie a pu surmonter l’écueil iranien et convaincre un pays comme l’Arabie Saoudite, réfractaire à toute baisse de la production, de signer cet accord prévoyant une réduction de la production des pays de l’Opep à hauteur de 500 000 barils. Noureddine Boutarfa assure que l’Algérie a joué sur ses relations «très amicales» avec l’Iran pour obtenir de ce pays un engagement de ne rien faire qui pourrait saboter la conclusion d’un accord lors de cette réunion d’Alger. Ce qui a été respecté par les Iraniens avec lesquels l’Algérie coopère étroitement sur plusieurs dossiers. S’agissant du changement d’attitude de l’Arabie Saoudite, le ministre de l’Energie souligne qu’il est la traduction d’une «entente» entre lui et le ministre saoudien de l’Energie suite à leurs discussions à Paris.
«J’ai eu l’engagement des Saoudiens à participer à tout accord qui travaillerait les intérêts de tous les pays membres de cette organisation lors d’une rencontre à Paris», précise M. Boutarfa qui parle ainsi d’un travail diplomatique et d’un lobbying de plusieurs semaines auprès des pays membres qui a débouché sur cet accord d’Alger. «Dans mes pourparlers lancés en juillet dernier, j’ai commencé par rencontrer les Iraniens qui posaient des conditions pour un gel éventuel de son niveau de production. Je leur ai dit que vous avez certes le droit d’atteindre votre niveau de production d’avant les sanctions. Mais que gagnerez-vous avec un baril à 20 dollars ?» relate-t-il en assurant leur avoir signifié clairement que «nous ne voulons pas d’un échec des pourparlers à Alger». M. Boutarfa lie la réussite de la réunion d’Alger aux bonnes relations qu’a l’Algérie avec tous les membres de l’Opep.
Le ministre de l’Energie évoque également l’accord de principe de la Russie de suivre toute décision qui émanerait de l’Opep. Le ministre reconnaît que l’engagement russe a été d’un grand apport dans l’obtention de cet accord. Selon lui, les pays membres de l’Opep nourrissent un grand espoir de voir dans un avenir proche les prix du pétrole augmenter de manière appréciable avec une coordination entre eux et les Russes. Il précise que l’accord a été obtenu à la dernière minute. Il souligne qu’au moment où les membres de l’Opep voulaient qu’on termine les pourparlers en renvoyant tout à la rencontre de Vienne, il était intervenu pour appeler penser d’abord à l’intérêt collectif pour lequel l’Opep avait été créée. «J’ai interpellé les pays fondateurs de cette organisation, à savoir l’Arabie Saoudite, l’Iran, le Venezuela et l’Irak en leur rappelant que l’objectif de sa création était de stabiliser le marché et de défendre l’intérêt collectif des pays membres», affirme M. Boutarfa. C’est à partir de là que les pays membres ont été d’accord de ne pas quitter la salle avant d’aboutir à un accord.
Le ministre estime que maintenant que le mur psychologique est brisé tout est possible en tablant sur une éventuelle baisse plus importante de la production lors des prochaines rencontres. C’est une dynamique qu’il faudra maintenir selon lui afin d’arriver à un équilibre qui permettrait d’avoir un baril durablement au-dessus des 50 dollars. Selon lui, une coordination entre l’Opep et les pays non Opep pourraient permettre de stabiliser le marché et éviter des chutes brusques des prix. Le ministre de l’Energie annonce ainsi la tenue d’une rencontre entre les pays Opep et non Opep en marge du Congrès mondial de l’énergie à Istanbul la semaine prochaine. Noureddine Boutarfa est revenu sur les investissements dans le secteur de l’énergie. Il annonce ainsi l’abandon du projet de gazoduc Galsi qui «n’est plus viable économiquement».
Mais les autres investissements sont maintenus, assure-t-il, indiquant que l’objectif de son département est d’atteindre d’ici 2020 1,4 million de barils jours. M. Boutarfa souligne néanmoins que l’Algérie n’est pas un pays pétrolier, mais plutôt gazier. Et le prix du gaz est indexé sur le pétrole. Ce qui signifie que la baisse du prix de l’or noir veut dire chute des revenus du gaz. Interrogé sur les nouvelles taxes introduites dans la loi de finances et qui toucheraient également le carburant, l’électricité et le gaz, Noureddine Boutarfa se montre plutôt rassurant en affirmant que toute augmentation des prix de vente de ces produits sensibles doit passer par le Parlement.
Sonia Baker
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