Réaction aux déclarations de Saïdani
Par Samir Bouakouir – Institutions fragilisées, un gouvernement incompétent naviguant à vue, une Présidence en situation de vacance, une justice ligotée face aux accusations de corruption de grande ampleur, une loi des finances antisociale, le pays s’approche jusqu’à frôler le seuil de rupture politique.
La scène politique est transformée en un ring politique où tous les coups sont permis. C’est le zéro moins l’infini de la pratique politique. Ce n’est certes pas nouveau, mais le contexte général actuel, à la fois national et régional, donne une résonance plus qu’inquiétante et met en péril la cohésion nationale et sociale.
Les déclarations récentes du SG du FLN accentuent, s’il en faut, l’état de déréliction morale et politique du pays. Plus grave encore, un cap redoutable est franchi dès lors que des accusations d’«intelligence avec l’étranger» sont portées à l’encontre d’autres secteurs du système. De telles accusations provoqueraient sous d’autres cieux une affaire d’Etat et donneraient lieu à une enquête amenant de lourdes sanctions si elles s’avèrent évidemment fondées.
Assurément, les vieux règlements de comptes prennent à présent une toute autre dimension et ce n’est pas surprenant que le FLN soit au cœur des enjeux. En effet, le contrôle de cet appareil a toujours permis au groupe ou clan dominant d’assoir son hégémonie au sein du système. Le groupe dit des «14» ne fait, en définitive, que s’inscrire dans ce «pugilat» interne, car, à aucun moment, les signataires n’indiquent une perspective réellement démocratique.
Le FLN n’a donc jamais été un parti au sens où l’entend la science politique. Il n’a jamais eu de rôle dirigeant à la manière des partis communistes de l’ex-bloc socialiste sous influence soviétique ou encore du PC vietnamien.
Le FLN, dépositaire devant l’éternel de la légitimité historique dont ne peut se priver le système, a toujours constitué l’instrument idéal aux mains de l’armée, colonne vertébrale du système. Selon les conjonctures, il passe sous la coupe d’un clan ou un autre pour garantir la longévité d’un ordre autoritaire.
Faute de légitimité démocratique, le FLN, quelle que soit sa direction, servira toujours de façade civile et les partis dits d’opposition sont sommés, s’ils veulent garder une représentation symbolique, de se positionner en fonction des rapports de force internes au sérail.
C’est dans cette perspective périlleuse qu’il faut également saisir les déclarations de Saïdani, dont le ton volontairement solennel et grave sert à duper l’opinion sur la monstrueuse supercherie du clan dominant prétendant asseoir l’Etat civil. Car celui-ci ne se décrétant pas, ne peut être matérialisé que par un processus politique démocratique capable d’en définir, de façon consensuelle, les constituants et les fondements.
Ce qui, en définitive, doit apparaître aux yeux de l’opinion et des militants authentiques de la démocratie comme étant bien plus gravissime, ce ne sont pas les accusations portées, par procuration, par l’actuel SG du FLN, mais c’est le fait que l’armée algérienne soit toujours instrumentalisée pour servir les desseins d’un groupe, d’une faction ou d’une coterie, au lieu de se mettre au service d’institutions démocratiques légitimes et de la nation.
Une situation qui doit interpeller urgemment les patriotes sincères, où qu’ils soient, afin de mettre fin à cette dangereuse dérive.
S. B.
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