Quand Tebboune fait des Algériens des rats d’expérimentation
Dans une réponse par courrier à un député islamiste qui l’interpellait sur l’état de délabrement des cités AADL pourtant récentes, le ministre de l’Habitat n’a pas trouvé mieux que d’avouer qu’il «bricole», en somme. Dans sa réponse, Tebboune se contente de «botter en touche», en laissant croire que le problème de l’hygiène dans les cités AADL et celui des ascenseurs en panne sont pris en charge par Gest-Immo qui va confier ces tâches à des entreprises lancées dans le cadre de la formule Ansej-Cnac. Il faut préciser que Gest-immo, filiale de l’AADL, a été créée en mai 2009, pour gérer les cités et faire en sorte que les ascenseurs fonctionnent, qu’il y ait l’éclairage, que la propreté règne, que les habitants se sentent en sécurité et, pourquoi pas, que les espaces verts et de loisirs soient bien entretenus.
En 2016, sept ans après, le ministre annonce que Gest-Immo va, à son tour, confier toutes ces tâches à d’autres sociétés qui feront la sous-traitance. Et, dans sa réponse au député, Tebboune laisse entendre qu’il n’est pas sûr que cette démarche réussisse, puisqu’il l’envisage comme une expérience dont il faudra valider les résultats avant de l’adopter et l’étendre. Cette réponse de Tebboune devrait être affichée dans toutes les cités AADL du pays pour que les Algériens, qui ont cru avoir la chance de leur vie en obtenant un logement par cette voie, sachent que finalement ils sont l’objet d’expériences effectuées pour trouver la meilleure formule de gestion de leurs grands habitats.
Après avoir patienté, pour certains presque le temps d’une génération, dans l’angoisse et le stress, sans informations fiables, pour recevoir enfin les clés de leur logement, ils devront, pour voir que leurs cités sont propres et pouvoir prendre l’ascenseur sans risque d’être bloqués entre deux étages, attendre encore les résultats de ces expérimentations faites avec des sociétés créées dans le cadre Anesj-Cnac qui elles-mêmes sans doute s’essaient à ces métiers, nouveaux pour elles. Au départ de l’opération, il y a une quinzaine d’années, on savait qu’au moins la moitié du parc d’immeubles AADL prévus allait être à neuf étages, pour 30% du total, selon les indications données par les responsables du projet, et à quinze étages pour 20%, toujours d’après ces mêmes responsables, c’est-à-dire dotés obligatoirement d’ascenseurs.
D’autre part, n’importe quel sociologue débutant sait que, dans leur grande majorité, les Algériens ne sont pas préparés et encore moins habitués à gérer les espaces communs dans les cités d’habitation, à de très rares exceptions. Comment l’Etat peut-il leur abandonner le patrimoine des cités AADL? Avec ces données, il était possible de prévoir les problèmes qui allaient se poser et anticiper. L’idée qui domine chez ceux qui habitent les cités AADL est que l’Etat leur livre les logements puis démissionne. Le manque d’attention accordée à la propreté des lieux et à la bonne maintenance des équipements, particulièrement les ascenseurs, est perçu comme une marque de mépris à l’endroit des locataires.
La formule AADL aurait pu être une réussite, les Algériens y ont beaucoup cru, mais la vie dans ces immeubles a viré, très souvent, au cauchemar avec la saleté autour et les pannes d’ascenseurs pour une durée indéterminée, doublées de la pénurie d’eau qui obligent à la pénible corvée des jerrycans en empruntant les escaliers.
Voilà où on en est: Tebboune fait construire des dizaines de milliers de cités, financés par l’argent public – 63 milliards de dollars, au bas mot, selon les chiffres connus – puis, quand les immondices s’amoncellent et que les ascenseurs tombent en panne au bout de quelques semaines, il «tente» une expérience pour régler ces problèmes ! Du jamais vu !
Houari Achouri
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