Gaz : Moscou et Ankara relancent le projet gazier Turk Stream
La Russie et la Turquie ont officiellement rétabli leur coopération énergétique gelée depuis près d’un an, en signant l’accord de construction du gazoduc Turk Stream, reliant les deux pays sous la mer Noire, avec une possible extension vers l’Europe. L’accord prévoit la construction de deux conduites d’une capacité de15,75 milliards de m3 chacune sous la mer Noire d’ici à décembre 2019, indique la presse russe, précisant qu’une conduite de Turk Stream transportera du gaz au marché turc et l’autre transitera par la Turquie vers les pays européens. Toutefois, la pose de la seconde conduite reste tributaire du feu vert devant émaner de l’Union européenne. Selon le projet, le gazoduc sera construit sous la mer Noire jusqu’à la partie européenne de la Turquie, sur une distance de 910 km, avec une prochaine extension vers la Grèce. Le coût du projet a été estimé précédemment à 11,4 milliards d’euros. L’accord a été signé lundi soir à Istanbul par les ministres turc et russe de l’Energie, à l’issue des entretiens du président russe Vladimir Poutine avec son homologue turc Recep Tayyip Erdogan, en marge des travaux du Congrès mondial de l’Energie. Selon l’accord, le groupe russe Gazprom contrôlera la partie maritime du gazoduc (910 km), alors que le tronçon terrestre (180 km) passant sur le territoire turc appartiendra à une société turque, selon le ministre russe del’Energie Alexandre Novak. La rencontre à Istanbul entre les présidents Poutine et Erdogan a scelléle rétablissement tout azimut de la coopération bilatérale, après huit mois de brouille causée par une dégradation des relations en novembre 2015, lorsqu’un chasseur turc avait abattu en Syrie un bombardier russe Sukhoï Su-24. Moscou avait alors introduit plusieurs restrictions économiques contre la Turquie. Début juillet 2016, les deux pays ont entamé une normalisation des relations économiques et commerciales. Au chapitre des projets énergétiques russo-turcs relancés, figure également la construction de la centrale nucléaire d’Akkuyu. De même que Moscou et Ankara se sont mis d’accord sur la réduction du prix du gaz russe pour la Turquie dans le cadre du projet Turk Stream.
Des négociations bilatérales seront également entamées en vue de la création d’un hub énergétique en Turquie conformément à un projet du président Erdogan. La construction du gazoduc Turk Stream avait été décidée par la Russie et la Turquie suite à la décision russe d’abandonner le projet South Stream provoquée par la position hostile de l’Union européenne. Selon les analystes, le Turk Stream offre de belles perspectives aussi bien pour la Russie que pour la Turquie. Moscou espère toujours parvenir à approvisionner l’Europe du Sud en contournant l’Ukraine, alors qu’Ankara tirerait plusieurs avantages de ce projet. La Turquie pourra d’abord consommer une partie du gaz transportée par ce futur gazoduc de grande taille.
Elle va en outre bénéficier de recettes de transit pour le gaz qui passerait par son territoire et qui irait vers l’Union européenne. Le troisième intérêt, selon les experts, concerne le fait que la réalisation du projet renforcerait le rôle de carrefour énergétique de la Turquie. Quatrième élément, et non le moindre pour la Turquie, cela renforcerait son importance stratégique vis-à-vis de l’Union européenne. Les gazoducs ne sont pas de simples projets industriels. Outre leurs dimensions économico-commerciales, ils ont également des dimensions politiques et géopolitiques, notent les observateurs.