Défaut de déclaration de patrimoine, enrichissement illicite et dénonciations abusives : Saïdani encourt la prison
La destitution tardive et bruyante du secrétaire général du FLN ne doit pas détourner l’attention de ses nombreuses frasques impunies. Si, jusque-là, il a été épargné par la justice grâce à sa position à la tête du FLN et à sa proximité avec les centres de décision politique influents, il n’en demeure pas moins que le justiciable Amar Saïdani doit être jugé pour plusieurs délits. En effet, les articles de loi relatifs à la déclaration du patrimoine, au code de conduite des agents publics, à la soustraction ou l’usage illicite de bien par un agent public, au défaut de déclaration de patrimoine et à la dénonciation abusive, prévoient des sanctions pouvant aller jusqu’à des peines d’emprisonnement et de lourdes amendes. Or, le sieur Amar Saïdani s’est rendu coupable tout au long de sa carrière au sein des rouages de l’Etat de ces infractions, sans qu’il n’ait jamais été inquiété.
L’ancien secrétaire général du FLN, qui ne jouit d’aucune immunité – celle-ci, faut-il le préciser, ne sert pas à exempter ses détenteurs des poursuites judiciaires en cas d’atteintes à la loi mais à les protéger dans l’exercice de leurs fonctions –, est accusé d’avoir participé au détournement de 4 000 milliards dans l’affaire de la Générale des concessions agricoles (GCA). En 2008, alors qu’il s’apprêtait à quitter Alger à destination de Paris, Amar Saïdani avait été refoulé de l’aéroport, car il était frappé d’une interdiction de sortie du territoire national ordonnée par la justice. En juin 2007, il fut convoqué par le tribunal de Djelfa mais il n’a jamais répondu à cette convocation. Cette affaire, qui a éclaté vers la fin de l’année 2006, et qui avait fait la Une des journaux, porte sur des délits de passation de marchés contraire à la législation, contrats fictifs, faux et usage de faux et paiement par anticipation à la réception d’ouvrages. Amar Saïdani y était mêlé à travers sa société-écran Al-Karama.
Après avoir menti de façon éhontée sur ses biens dissimulés en France, alors qu’il présidait aux destinées d’un parti historique qui revêt une charge symbolique très forte pour les Algériens, Amar Saïdani fut acculé par les révélations d’Algeriepatriotique et finit par passer aux aveux en reconnaissant avoir acquis un bien onéreux à l’étranger. «Oui, j’ai effectivement acheté un appartement à Paris», avait-il avoué dans un entretien au quotidien arabophone El-Khabar. Le voisin de Sarkozy avait tenu à préciser qu’il avait remis un dossier détaillé sur cette acquisition au chef du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), le général Toufik, contre lequel – schizophrénie ou manœuvre défensive ? – il a débordé d’accusations inimaginables qui peuvent lui valoir jusqu’à six ans de prison vu la gravité de la diffamation.
Algeriepatriotique avait mis la main, en novembre 2014, sur un document qui confirmait les acquisitions immobilières d’Amar Saïdani dans la capitale française. Il s’agit du contrat d’achat de l’un des deux appartements que nous avions pu «recenser» en avril 2014. D’une superficie de 101,61 m2, cet appartement a été acheté auprès d’un couple mexicain en novembre 2009. Il est situé au 9/15 boulevard Victor Hugo, à Neuilly-sur-Seine. L’acquisition a été effectuée au nom de la société civile immobilière L’Olivier, créée en juillet 2009 – soit quelques mois auparavant – et gérée par l’une des filles d’Amar Saïdani, Kenza. Le siège social de la SCI L’Olivier, spécialisée dans l’acquisition et l’exploitation de tous biens et droits immobiliers, est sis au 48, rue de la Bienfaisance, dans le très chic VIIIe arrondissement de Paris. Outre Amar Saïdani, sont actionnaires dans cette société tous ses enfants et son épouse.
Pour acquérir l’appartement en question, Amar Saïdani a pris ses dispositions en évitant de payer cash la totalité du prix. En effet, comme le souligne le contrat, à travers la société L’Olivier, Amar Saïdani a versé 317 500 euros et contracté un crédit immobilier de 347 500 euros auprès du Crédit du Nord, avec un taux d’intérêt annuel de 3,55%. Le coût de ce crédit est fixé à 147 745 euros, avec possibilité de réévaluation. Il le remboursera en 180 mensualités de 2 700 euros. Pour conclure cette transaction, Saïdani a également déboursé plus de 33 000 euros en frais. Question : d’où l’ancien président de l’APN tient-il cet argent ?
La justice bougera-t-elle enfin ou faudra-t-il qu’un collectif de citoyens se constitue partie civile ?
Karim Bouali
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