«Encore un soir»
Par Nordine Mzalla – Nos lecteurs mélomanes, fans de la célèbre chanteuse Céline Dion, pardonneront ce titre trompeur. Non, nous ne parlerons ni du texte sentimental d’une chanson en vogue ni du talent de la Diva canadienne. L’activité politique nationale ayant perdu beaucoup de ses vertus, nous nous intéresserons aujourd’hui au lyrisme dangereux des chantres du régime. Certes, il faut l’avouer, il y a sur le plan paradigmatique une sacrée similitude entre notre refrain national populaire «One, two, three…» et les incantations claniques «Pour un cinquième mandat». Sauf qu’il est indéniable que le premier slogan exalte la patrie quand le second veut humilier les Algériens.
Que se passe-t-il donc au sommet de l’Etat pour qu’on en soit arrivés à autant de cynisme effronté ? Pour que des responsables politiques, septuagénaires indéboulonnables, viennent promouvoir la candidature du président en exercice – quasi octogénaire – pour la prochaine échéance électorale, alors que nous ne sommes officiellement qu’à mi-mandat et que chaque jour que Dieu fait, la santé du Président inquiète les citoyens frappés par l’inflation et toutes les répercussions de la chute du prix du baril ?
D’aucuns auront compris que le régime n’a pas trouvé d’homme consensuel pour la relève et que, faute de pouvoir compter sur une alternance démocratique qui mettra en concurrence des candidats, les apparatchiks de l’ère Bouteflika préfèrent prêter un mandat à vie au président en place. Quitte à piétiner éternellement les principes républicains et à investir vilainement dans la moyenâgeuse croyance en «l’homme providentiel», alors que l’Algérie, puissance régionale incontestée, peuplée de patriotes chevronnés jaloux de leur histoire et de la liberté, regorge d’un potentiel humain capable de prendre en main la destinée du pays et même d’assumer des missions internationales de première importance.
«Encore un mandat» ou «encore un soir» d’inquiétude, d’extrême angoisse pour la nation otage d’une gérontocratie soutenue par de plus jeunes loups aux dents longues. A moins que la bonne étoile qui a toujours sauvé la Terre bénie de Dieu, comme l’appelaient non sans jalousie les colons français, vienne apporter sa lumière et guider le peuple algérien vers un avenir résolument républicain où la compétence et le patriotisme authentiques ne seront plus parasités par le culte de la personnalité et d’anachroniques légitimités historiques contre-révolutionnaires.
N. M.
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