Akbou et Béchar : la justice informelle
Par Kamel Moulfi – A deux reprises, en l’espace d’à peine quelques jours, des citoyens ont violé la loi et bravé les institutions, en se faisant justice eux-mêmes, à Béchar, par l’incendie de la maison des présumés coupables de l’enlèvement et de l’assassinat d’un enfant, et à Akbou, en lynchant un voleur de bétail. Plus d’un millier de km séparent les deux villes, mais le même état d’esprit y règne avec une propension commune à la violence qui domine dans la population et il n’est pas exagéré de penser que des scènes identiques sont envisageables ailleurs, en n’importe quel autre point du territoire algérien, si elles ne se sont pas déjà déroulées.
Il y a dans ces deux faits l’expression d’une «solidarité» dans la violence, qui se manifeste avec une brutalité encore plus forte dans les batailles sanglantes et parfois mortelles entre familles ou entre gangs, armés de sabres et de couteaux, dans les cités et villages. On peut déceler le signe d’une indifférence à l’égard des institutions chargées de faire respecter l’ordre public et assurer la protection de tous en réprimant la délinquance. On ne peut pas affirmer que celles-ci ne font pas leur travail, puisqu’elles réussissent à limiter les dégâts en intervenant assez rapidement, mais il semble bien que l’ampleur de la dynamique de violence «collective» dans la société algérienne soit sous-estimée, ce qui explique les lacunes dans la démarche de prévention.
Les citoyens qui usent de violences pour régler des comptes donnent l’impression d’assimiler le laxisme dans l’action des pouvoirs publics à un vide qui les pousse à agir. Ce laxisme, tout le monde le constate dans la sorte de complaisance dont bénéficient souvent les gardiens de parkings sauvages, ainsi que les vendeurs ou acheteurs de produits divers, qui importunent les passants de façon agressive, particulièrement les femmes, directement sur la voie publique, au vu de tous, agissant impunément comme s’ils avaient l’autorisation de pratiquer leurs occupations illégales. En fait, c’est l’Etat de droit qui est défié.
K. M.
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