Interview exclusive – Abderahmane Belayat : «Dans la situation actuelle, le FLN ne pourra pas gagner les élections»
Algeriepatriotique : Quelle est votre réaction par rapport aux dernières annonces du nouveau secrétaire général du FLN, Djamel Ould-Abbès ?
Abderahmane Belayat : Soyez plus précis et je vous réponds !
Djamel Ould-Abbès a annoncé la réintégration des parlementaires frondeurs qui ont été écartés…
D’abord, ce n’est que justice. Les parlementaires dont il s’agit ont été injustement privés de leurs droits au sein du groupe parlementaire. Au nom de pseudo-punitions tout à fait contraires aux règles élémentaires du conseil de discipline aussi bien dans le groupe parlementaire qu’au sein du parti. Donc, maintenant qu’Ould-Abbès répare l’erreur de celui qui l’a précédé, nous ne pouvons enregistrer cela qu’avec satisfaction.
En ce qui concerne le cas d’Abdelaziz Belkhadem, quel est actuellement son statut au niveau des structures du parti ?
Abdelaziz Belkhadem est un membre du comité central. C’est-à-dire, selon de IXe congrès. Le Xe congrès étant, pour nous, nul et non avenu et, par conséquent, de nul effet. Il reste qu’Abdelaziz Belkhadem demeure, selon nous, membre du comité central et, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il reste militant du FLN.
Quid de la décision de mise à l’écart annoncée par le communiqué de la présidence de la République le 26 août 2014 ?
C’est ancien tout ceci. Pourquoi revenez-vous à cela ? La décision à laquelle vous faites référence comporte deux parties. Une partie concernant les fonctions que détenait Abdelaziz Belkhadem au sommet de l’Etat, c’est-à-dire en tant que conseiller à la Présidence. Ce qui dépend de la volonté du président dans la nomination et lors de la mise de fin de fonction. Personne ne peut discuter cela. Quant à sa situation et sa position au sein du parti en tant que militant, il a tous ses droits et il est tenu à toutes ses obligations. Il n’y a rien de nouveau sous le ciel. Il ne peut engager le parti s’il n’est pas mandaté pour ce faire, et il exerce tous ses droits que personne ne peut lui enlever, sauf à passer devant un conseil de discipline, il garde donc tous ses droits.
La déclaration d’Ould-Abbès ne va pas dans ce sens et affirme qu’«on ne commente pas et (qu)’on ne discute pas une décision du président de la République»…
Mais tout cela remonte à plus de deux années. Pourquoi y revenir ? Qui remet ceci à l’ordre du jour ? Je ne sais pas ! C’est apparemment l’opinion d’Ould-Abbès, mais le Président ne fait pas cette interdiction. Le Président lui-même ne rejette pas cette capacité et cette liberté qui sont données au militant du parti. Vous savez, quand le Président signe une ordonnance ou une loi, le citoyen a le droit de la commenter, le militant également.
L’heure est à la préparation des élections législatives. Maintenez-vous toujours la protesta et menacez-vous toujours de présenter des listes parallèles ?
Ce n’est pas une menace mais tout simplement un bon procédé. C’est-à-dire que nous voulons que les décisions soient prises en connaissance de cause. Dans la situation actuelle, le FLN ne pourra pas gagner les élections. Pis encore, il peut ramasser une déconfiture assurée si les choses restent en l’état. Les préparatifs qu’Ould-Abbès est en train de concevoir sont des préliminaires, parce que les élections législatives ne sont pas encore à l’ordre du jour. Nous pensons que ces préliminaires doivent englober ceux qui ont contesté le Xe congrès et tout ce qui en a résulté au comité central et au bureau politique. C’est clair, net et précis : il faut préparer les élections avec ceux qui sont capables d’assurer le succès du FLN. S’il y a une réunification des rangs, nous gagnerons les élections. Sinon, la responsabilité est bien identifiée, ce n’est pas la nôtre. [Ils] savent très bien qu’au moment venu, nous ne pouvons pas laisser le FLN sans les candidatures légitimes et légales.
Le nouveau secrétaire général a tout de même annoncé l’installation d’une commission de préparation des élections…
Nous ne sommes pas dans cette commission. Et si nous ne sommes pas partie prenante, c’est qu’il n’y a rien de changé, et ceci est contraire à la feuille de route donnée par le Président. Ce dernier a donné des orientations pour suivre une ligne qui doit réunifier les rangs. Or, les mesures qui sont annoncées maintenant n’ont pas pris en considération cet impératif, cet objectif fixé par le Président. C’est contraire à ce que veut le Président ; c’est contraire à l’intérêt du parti ; c’est contraire à notre droit.
Le bras de fer continue ?
Nous ne sommes pas dans une position de bras de fer mais si le bras de fer nous est imposé, nous sommes capables de le gagner.
Il y a toutefois l’ex-président de l’APN, Abdelaziz Ziari, qui aurait été chargé des dossiers spéciaux. C’est dans le cadre d’une réhabilitation…
Oui, mais la personne dont vous parlez a été choisie et n’engage que sa personne. Ce n’est pas suffisant. Cela n’engage pas notre mouvement qui se bat sur des principes qu’il a arrêtés. Cela me rappelle la pièce Horace de Corneille. Ould-Abbès voudrait prendre les militants de notre mouvement un par un, comme dans les duels contre les Curiaces. Nous ne sommes pas des Curiaces isolés, nous sommes un front uni de Curiaces pour rétablir le FLN dans sa bonne marche.
Quelle perspective dans l’immédiat ?
Permettre à Ould-Abbès de s’installer, lui permettre de procéder à un marquage de ceux qui le gênent dans son appartenance. Puis de convaincre les autres tendances de suivre ce que lui a demandé le Président. Pour ce qui nous concerne, cela ne nous pose aucun problème dès lors qu’il respecte le plan donné par le Président.
Etes-vous en contact avec Abdelaziz Belkhadem ?
Bien sûr ! Nous venons de tenir une réunion avec lui.
Cela s’est-il bien passé ?
Très bien passé. Nous sommes en symbiose.
Quel est son sentiment par rapport à l’évolution des événements au sein du FLN ?
Son sentiment c’est qu’il faut de la patience, qu’il faut de la tolérance, de la fermeté aussi et de la persévérance. C’est exactement ce à quoi nous croyons.
Pensez-vous que les jours à venir seront favorables pour une réunification ?
Oui, étant donné la bonne image de Belkhadem auprès du Président.
Malgré la rupture ?
Il n’y a pas de rupture définitive, c’est comme les scènes de ménage. Je fais un peu d’autodérision… (rires)
Par rapport aux autres formations politiques, selon vous, le FLN peut-il encore prétendre à des postes dans le prochain gouvernement ?
Participer dans le gouvernement, c’est notre credo et notre créneau. Forfanterie mise à part, je crois que nous gagnerons les élections si nous sommes réunis.
Du ressentiment à l’endroit des ministres militants qui ont applaudi les dérapages de l’ex-secrétaire général ?
Ces ministres dont vous parlez bénéficient de notre charité islamique. C’est-à-dire que lorsque votre prochain a fauté, le remord doit suffire. Point besoin de le faire souffrir davantage. La torture de leur conscience est autrement plus grave que nos reproches.
Enfin, croyez-vous que sous la nouvelle direction, les forces de l’argent seront neutralisées au sein du FLN ?
Moi, je peux vous garantir que, de notre côté, les forces de l’argent, sale ou pas sale, n’ont pas de place chez nous. Maintenant, si elles persistent à conserver une place par les reliques du prédécesseur d’Ould-Abbès, nous les combattrons.
Un dernier mot…
Je vous remercie de l’intérêt que vous portez à notre parti et de la confiance que vous prêtez à ma parole.
Entretien réalisé par Akli Tira
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