Projet de loi sur la nationalité exclusive : le FLN peu loquace, le RND très offensif
Le projet de loi relatif à la nationalité algérienne exclusive pour les hautes fonctions suscite beaucoup de débat au sein de l’Assemblée populaire nationale. Les débats ont remis au grand jour la rivalité entre le FLN et le RND qui n’ont pas défendu avec la même pugnacité ce projet de loi. Ne pouvant pas s’opposer ouvertement à un texte de loi qui est venu mettre la législation en adéquation avec la nouvelle Constitution promulguée en mars dernier, les députés FLN se sont montrés peu loquaces. Les rares intervenants se sont contentés d’approuver le texte.
En tout cas, on est loin de la véhémence avec laquelle l’ex-secrétaire général du FLN, Amar Saïdani, attaquait ce projet de loi. Le chef du groupe parlementaire Mohammed Djemaï a indiqué que ce texte «est venu renforcer la sécurité nationale dans la mesure où les fonctions de souveraineté donnent accès à de nombreuses informations à caractère confidentiel». Les députés RND ont, quant à eux, défendu ce texte de loi avec énergie. Certains d’entre eux sont allés encore plus loin, en réclamant l’élargissement de la liste des hautes fonctions concernées pour qu’elles touchent également les postes d’ambassadeur et de consul.
Ainsi, le député Salah Eddine Dekhili a assuré que ce texte «est venu barrer la route aux manœuvres visant à susciter la fitna entre les enfants d’un même pays». «La nationalité n’est pas un simple document administratif mais l’expression d’un sentiment d’appartenance et de loyauté à la patrie et d’une responsabilité à l’égard des intérêts nationaux de l’Etat», a-t-il soutenu. D’autres députés du parti lui ont emboîté le pas. Un amendement a d’ailleurs été introduit dans ce sens. Il reste de savoir si la commission juridique va l’accepter ou pas.
Le Parti des travailleurs a été le plus proche de la position du RND par rapport à ce projet de loi. Dans son intervention, le chef du groupe parlementaire, Ramtane Youssef Taazibt, a estimé que ce projet de loi aurait dû être promulgué il y a longtemps. Soutenant ce texte de loi, Taazibt a relevé la nécessité d’intégrer les responsables des entreprises stratégiques du pays telles que Sonatrach. Cela en assurant que le PT n’a rien contre les binationaux. «Cette loi ne remet aucunement en doute la loyauté des membres de la communauté algérienne envers leur patrie mais constitue une mesure préventive qui participe de la défense des intérêts supérieurs de l’Etat», a-t-il affirmé en estimant que la préservation de la souveraineté nationale exige de mettre des garde-fous.
C’est aussi la demande du député Lakhdar Benkhallef du Front pour la justice et le développement (FJD) qui a estimé que «les ambassadeurs, les consuls généraux, les directeurs de cabinet et les secrétaires généraux des ministères, les walis, les présidents de daïras et d’autres fonctions encore doivent être inclus dans la liste».
Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Louh, a affirmé, en répondant aux députés, que le projet de loi fixant la liste des hautes responsabilités de l’Etat et des fonctions politiques dont l’accès requiert la nationalité algérienne exclusive consacrait le principe d’équité entre tous les citoyens en matière d’accès aux hautes fonctions de l’Etat. Ce texte a été élaboré par une commission composée de représentants de plusieurs secteurs qui a conclu à «la nécessité de restreindre» la liste des hautes fonctions concernées par cette mesure, partant du principe d’équité entre les citoyens en matière d’accès aux hautes fonctions de l’Etat, «sans autres conditions que celles fixées par la Constitution».
Tayeb Louh a beaucoup défendu ce projet de loi qui vise, selon lui, à «rassurer la communauté nationale à l’étranger et (à) conforter leur sentiment d’appartenance à la nation, en leur ouvrant l’accès aux hautes responsabilités de l’Etat». Une fois le projet de loi promulgué, tout postulant à une haute responsabilité de l’Etat doit produire une déclaration sur l’honneur de sa nationalité algérienne exclusive à remettre au Premier président de la Cour suprême, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi au Journal officiel.
Sur ce principe, le texte intervient dans «le cadre de la promotion des valeurs morales régissant la société», d’autant que le concerné «est responsable des points de vue moral et légal car il est passible de sanctions en cas de fausse déclaration», a précisé Tayeb Louh.
Quinze hautes fonctions exigent la jouissance exclusive de la nationalité algérienne. Il s’agit du président du Conseil de la nation, du président de l’Assemblée populaire nationale (APN), du Premier ministre, du président du Conseil constitutionnel, des membres du gouvernement, du Secrétaire général du gouvernement, du premier président de la Cour suprême, du président du Conseil de l’Etat, du gouverneur de la Banque d’Algérie, des responsables des corps de sécurité, du président de la Haute Instance indépendante de surveillance des élections, du chef d’état-major de l’Armée nationale populaire (ANP), des commandants des forces armées, des commandants des Régions militaires et de toute haute responsabilité militaire fixée par voie de règlement.
Sonia Baker
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